tient encore notre sainte mère l'Église et contre le consentement unanime des Pères.
Le remède est que, dans les choses de la foi et des mœurs qui entrent dans l'édifice de la doctrine chrétienne, il ne soit permis à personne en interprétant la sainte Écriture de se séparer sous aucun prétexte, soit en public soit en particulier, du sentiment de notre sainte mère l'Église, à qui il appartient de décider de la véritable interprétation et du sens des saintes Écritures, ou même du consentement unanime des Pères, sous les peines. que le saint synode déterminera. A. Theiner, op. cit., 1. 1, p. 65 ; Et. Ehses, Concilium Tridentinum, 1911, t. v, p. 29.
Dans son IIP Journal Massarelli a résumé cet abus en ces termes : Tertius est, qiiem libel inlerptetare ad suum sensum sacram Scripturam. Remedium est, ut nemini liceat. S. Merkle, op. cit., 1. 1, p. 436.
La discussion commença et fut continuée. Le cardinal de Trente déclara qu’il fallait statuer que l'Église seule devait interpréter l'Écriture. Le cardinal de Jæn opina que, dans le remède de cet abus, il fallait expliquer quelles personnes avaient, dans l'Église, l’autorité nécessaire pour interpréter l'Écriture. A son avis, seuls les docteurs et les maîtres approuvés par une université avaient ce droit ; il fallait, en outre, interdire absolument aux laïques de le faire en public ou en particulier ; enfm, il vaudrait mieux expliquer les paroles saintes d’après le sentiment de l'Église, afin de ne pas s’exposer à le faire d’après son sentiment propre. La majorité se rangea à l’avis du cardinal de Jæn au sujet de l’interdiction absolue aux laïques et de la restriction aux gradués parmi les ecclésiastiques eux-mêmes. Mais le projet de décret, rédigé d’après un rapport de l'évêque de Bitonto, ne détermina pas quelles personnes avaient le droit d’interpréter l'Écriture. On ne pouvait interdire l’explication faite privalim ; si, pour le faire en public, il fallait être docte, il n'était pas nécessaire d'être docteur. Saint Jérôme n’avait aucun grade académique, et l’Esprit Saint souffle où il veut.
L'évêque de Sassaris opina le premier que celui qui interprétait l'Écriture dans son sens propre, était un hérétique et ne commettait pas seulement un abus. Plusieurs Pères répétèrent à sa suite qu’une telle interprétation était une hérésie, et non un abus. L'évêque de Sebenico en concluait qu’on devait procéder contre de tels interprètes comme on procède contre les hérétiques. Ces Pères visaient évidemment les interprétations qui auraient été contraires à des définitions formelles de l'Église sur le sens de l'Écriture. L'évêque des Canaries dit que les commentaires écrits devaient être approuvés, avant d'être édités. L'évêque de Chioggia distingua deux manières d’interpréter l'Écriture contrairement au sentiment commun de l'Église : la première et la principale se rencontre, quand l'Église a déjà dit son sentiment et la seconde, quand elle ne l’a pas fait. Dans ce dernier cas, il n’y a pas d’hérésie. Le remède à l’abus consistant à ne permettre l’interprétation de l'Écriture qu'à quelques personnes n’est pas bon ; car le Saint-Esprit est le seul docteur de l’interprélalion de la Bible, qui par suite n’est ni unprivilège ni une licence.
Le 7 avril, le décret qui avait été rédigé par la commission fut lu et fut approuvé, sans changement, même par le cardinal de Jæn, qui consentit à ce que les laïques ne fussent pas exclus du droit d’interpréter l'Écriture. Ehses, t. iv, p. 82, 84-86.
C’est là tout ce que les Actes du concile nous apprennent sur la discussion de ce décret. Le concile ne changea donc rien au droit des laïques ; il ne détermina pas de peines à infliger aux contrevenants, sinon celles que le droit ancien avait établies. Mai-s, d’autre part, il n’expliqua pas le sens des mots : in rébus fidei et morutn ad œdificationem doctrinæ christianæ pertinentium, qm apparaissent, dès le 17 mars 1546, dans
la rédaction du troisième abus et de son remède, et qui seront discutés pai' les théologiens après le concile du Vatican. Ces Actes ne nous fournissent donc rien qui serve à déterminer le sens précis que le concile donnait à ces paroles et à résoudre la discussion des théologiens postérieurs. Enfin, le décret du concile de Trente avait une forme négative : il n’obligeait pas positivement les exégètes catholiques à adopter le sens de l'Écriture tenu par l'Église ou conforme au sentiment unanime des Pères ; il défendait seulement d’interpréter les texte sacrés, dans les choses de foi et de mœurs qui appartiennent à l'édifice de la doctrine chrétienne, contrairement au sens ainsi fixé.
2. Pie IV, dans la profession de foi qu’il imposa après la clôture du concile de Trente, donna une formule positive à la doctrine du concile sur l’interprétation de l'Écriture. Il fit promettre d’admettre le sens tenu par l'Église et de n’interpréter l'Écriture que selon le consentement unanime des Pères. D’autre part, il supprima les mots restrictifs : in rébus fidei et morum, suppression qui s’explique sans doute par l’intention d’abréger le texte conciliaire, plutôt que par celle d’en modifier l’objet.
3. Le concile du Vatican renouvela le décret de Trente ; mais il en précisa le sens, en lui donnant une forme positive et il y maintint les termes restrictifs ; in rébus fidei et morum, etc., sous-entendus dans la profession de foi de Pie IV.
a) Occasion du décret. — Le schéma de constitution dogmatique sur la doctrine cathofique, rédigé par Franzelin, nous la fait connaître : Et quia non désuni petulantia ingénia, a quibus Scriptura sacra ad alienos sensus delorquetur, contra eum sensum quem tenuil et tenet sancta mater Ecclesia, hinc rénovantes quæ a sacra Tridentina synodocircaScripturœinterpretationemscriptafuerunt… Collectio Lacensis, t. vii, col. 508-509. Une note, annexée à ce schéma, expliquait la raison de ce renouvellement du décret. En le portant, le concile de Trente n’avait pas établi une loi nouvelle, comme Pallavicini l’a très bien prouvé dans son Histoire du concile de Trente, t. VI, c. xviii, n. 3 sq. ; il a seulement déclaré l’obligation qui résulte pour tous les fidèles de l’infaillibilité reconnue à l'Église, quand elle interprète l'Écriture. Quelques critiques récents ont donc mal compris ce décret qu’ils détournaient témérairement de son sens réel. Quelques-uns prétendaient qu’il était de pure discipline et qu’il n’avait pas été porté pour tous les temps, mais seulement pour les circonstances dans lesquelles il a été édité. D’autres ont soutenu que le concile défend seulement d’interpréter l'Écriture contre le sens tenu par l'Église, de telle sorte qu’il est seulement interdit, en interprétant l'Écriture, d’exclure ou de nier quelque dogme de la foi défini par l'Église. Ainsi, quoique l'Église ait défini que le texte de saint Jacques, v, 14, concerne le sacrement de l’extrême-onction, toutefois ce sens n’est pas nécessairement une règle d’interprétation de ce passage, et on pourrait dire que ce texte ne parle pas de l’extrême onction, pourvu qu’on ne nie pas ce dogme de l'Église. Il est donc nécessaire, ad hujusmndi ingénia coercenda, de déterminer la signification du décret de Trente, de façon à exclure ces deux erreurs, en établissant que le décret n’est pas disciplinaire, mais dogmatique, et qu’il n’exclut pas seulement une interprétation qui serait en contradiction avec un dogme, mais que l'Église a défini réellement que c’est le véritable sens de l'Écriture. Ibid., col. 523.
La même raison de renouveler le décret de Trente était donnée dans le schéma remanié par Mgr Martin, évcque de Paderborn : parce que les termes de ce décret a quibusdam hominibus prave exponuntur. Ibid., col. 1629. De fait, cette raison fut signalée dans leschéma proposé à l’examen des Pères du concile. Ibid., col. 72.