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501 JANSÉNISME, QUESTION DE DROIT ET QUESTION DE EAIT 502

propositions étaient réellement dans VAugustinus, Caoilli fanstnistarum. Cet ouvrage, écrit l’éditeur des

Œuvres d’Arnauld, t. xix, p. xxiii, força les jansénistes à rompre le silence a fin de se défendre. Arnauld répondit au P Annat, Œuvres, t. xix, p. 1-17-195 : « La première proposition est la seule, dit-il. qui soit extraite du livre de Jansénius et elle présente un tout autre sens que dans le texte dont elle est détachée et dont elle dilTère par cinq différences essentielles. » Les quatre autres ne se trouvent dans Jansénius ni en termes exprés, ni en termes équivalents. Prcsqu’en même temps, Arnauld publia le Mémoire sur les desseins qu’ont l>-s Jésuites, Œuires.l. xix, p. 190-207, et un Éclaircissement à quelques nouvelles objections, ibid., t. xix, p. 208-227. pour les présenter à la prochaine assemblée du clergé.

De son côté, le P. Annat réédita ses thèses sur les cinq propositions dans un nouvel écrit : La doctrine de Jansénius contraire à la doctrine de l’Éylise romaine et à cette de S. Augustin ; Arnauld répondit, mais, écrit son éditeur, t. xix. p. xxix. à la demande de Mazarin, il ne publia pas cette réponse qui se trouve. Œuvres, t. xix, p. 238-308, sous le litre suivant : Franciscus Annulas Jesuilu, famosi uuclor programmons cuidilu-Ins est : ’Jansenii doctrina Sedi Apo*tolirœet S. Auguslino contraria in V propositionibus, » in jxponendis Jansenii sententiis fraudulenliæ, in explicanda pontifieuli contlilutione lemeritalis, in eiponenda B.Auguslini doctrina inscitiæ et perfidiee, a Theologo Lovaniensi convictus. La première partie de La défense de la constitution <T Jn.-iocent X et de la foi de l’Église contre le P. Annal fut également présentée à l’assemblée du cierge, pour empêcher cplle-ci de souscrire à la condamnation des cinq propositions, mais l’assemblée passa outre.

Le 9 mars 1654, les évêques présents à Paris se réunirent et désignèrent quatre archevêques et quatre évêques pour examiner la question et faire un rapport à l’assemblée générale. En dix séances, ils rapprochèrent de VAugustinus les cinq propositions ; après avoir lu les écrits composés pour la défense de Jansénius, les évêques assemblés déclarèrent que « l’on était obligé de dire que ces cinq propositions étaient condamnées en leur sens propre qui était le sens de Jansénius » et le 28 mars, il fut décidé que > l’on déclarerait que la constitution avait condamné les cinq propositions, comme étant de Jansénius et au sens de Jansénius. Trente-sept évêques écrivirent au pape (28 mars 1654) et envoyèrent aux évêques absents une lettre circulaire dans laquelle ils constatent que « des personnes osent assurer et tachent de persuader aux autres deux choses qui n’ont aucun fondement : la première que les cinq propositions ne sont point de Jansénius, la seconde qu’elles ont été condamnées en un sens nui n’appartient en rien à Jansénius. » Les prélats ont reconnu très clairement, par la lecture de la constitution et encore par celle des livres de Jansénius qu’ils ont soigneusement lus examines pour ce qui regarde les cinq propositions, que ces cinq propositions sont vraiment de Jansénius et qu’elles sont condamnées au propre sens de leurs paroles, qui est celui-là même auquel cet auteur les enseigne et les explique. » Hermant, Mémoires, t. ii, p. 419-442, 464-490. Le pape répondit par un bref du 29 septembre 1 Gô 1 ; il y affirme que, par la constitution du 31 mai 1653, « il a condamné, dans les cinq propositions, la doctrine de Cornélius Jansénius contenue dans son livre intitulé Augustin us et il ajoute un décret du 23 avril 1654 qui condamne et défend plusieurs écrits qui soutiennent la doctrine de f’AufUstinus, entre autres les deux Apologies pour Janséniim, composées par Arnauld, La grâce victorieuse de Jésus-Christ ou Molina et ses disciples con vaincus de l’erreur des pélagiens et des semi-pélagiens, œuvre de La Lane, V Écrit à trois colonnes ou distinction abrégée des cinq propositions, la Théologie familière de Salnt-Cyran, la Lettre pastorale de Mgr l’archevêque de Sens pour la publication de la constitution, l’Ordonnance de M. l’évêque de Comminges, les Entuminures du fameux almanach des PP. jésuites, la Réponse au P. Annal louchant les cinq propositions attribuées à M. l’évêque d’Ypres, et un grand nombre d’autres écrits (en tout 49). Hermant. op. cit., p. 513 527.

Le bref du pape fut reçu par l’assemblée du clergé le 20 mai 1655. A cette date, Arnauld avait publié sa fameuse Lettre à une personne de condition (24 février 1654) au sujet de l’affaire du duc de Liancourt à qui son confesseur, M. Picoté, avait refusé l’absolution, parce que le duc n’avait pas donné de marques suffisantes de soumission à la constitution d’Innocent X et avaitrefuséde renvoyer dechez lui deux jansénistes de marque, le P. Desmares et l’abbé de Dourzéis, et de rompre ses relations avec des jansénistes notoires. Rapin, Mémoires, t. ii, p. 235-250, 297-308 ; Fuzet, op. cil., p. 281-287. Dans cette lettre, Œuvres, t. xix, p. 311-334, Arnauîd déclare queles erreurs condamnées par le pape ne sont point défendues parles prétendus jansénistes, car « d’une part, ils condamnent sincèrement les cinq propositions censurées par le pape en quelque livre qu’on les puisse trouver, sans exception, et, d’autre part, ils ne sont attachés à aucun auteur particulier qui forme des opinions nouvelles et qui parle de lui-même touchant la matière de la grâce, mais à la seule doctrine de saint Augustin » G. Hermant, op. cit., t. ii, p. 624-627. En réponse à cette lettre parurent plusieurs écrits ; Rapin, Mémoires, t. ii, p. 247, en cite neuf. M. Fronson composa deux lettres à M. Arnauld, 18 mars et 19 avril 1655, citées dans la correspondance de M. Tronson publiée par L. Dert rand, Le tires choisies, Paris, 1904, t. iii, p. 5-43. On soutenait qu’Arnauld et ses amis, en particulier, l’abbé de Bourzéis, avaient accepté la doctrine condamnée et, par suite, devaient faire une soumission explicite et reconnaître nettement que les cinq propositions étaient dans Jansénius, conformément au bref du pape et à la lettre de l’assemblée du clergé. Arnauld répondit par une Seconde lettre à un duc et pair de France (10 juillet 1655) ; Œuvres, t. xix, p. 335-560, (il s’agit du duc de Luynes). Arnauld y défend les jansénistes qu’on traitait en excommuniés et il met en avant d’une manière formelle la célèbre distinction du fait et du droit : 1. En lait, les cinq propositions ne sa trouvent pas dans V Aunustinus et elles n’ont été soutenuespar personne dans le sens on elles sont condamnées, mais elles ont été fabriquées en haine de saint Augustin ; ces propositions ne peuvent être attribués à Jansénius, à moins d’imposer des hérésies à un évêque catholique qui fut toujours très soumis à l’Eglise ; en fait, on ne peut exiger d’un catholique qui, ayant parcouru attentivement le livre de Jansénius, déclare n’y avoir pas trouvé les propositions condamnées, rien de plus qu’un assentiment extérieur qui ne s’oppose pas au décret apostolique et conserve, à ce sujet, un silence respectueux. 2. En droit, la grâce sans laquelle on ne peut rien a manqué à un juste en la personne de saint Pierre en une occasion où l’on ne peut pas dire qu’il n’ait pas péché. Saint Pierre n’a péché que parce que la grâce lui a manqué En résumé, Arnauld Tait une protestation publique de soumission à la bulle, mais en réalité ne l’accepte point. Hermant, on. cit., t. il, p. 707-709. Cette longue lettre de 250 papes donna, écrit Rapin, Mémoires, l. ii, p. 306, une autre face aux affaires de la cabale et elle fut, elle seule, capable de ressusciter le jansénisme qui, régulièrement parlant, devait être détruit par la constitution d’Innocent X et par la manière dont cette