quitta Cucuse vers la fin de juin 107. Le voyage se fit lentement, car au début de septembre on était seulement aux abords de la petite ville de Comane, dans le l’ont Jean dormit sa dernière nuit dans une chapelle de campagne, dédiée à un martyr local, saint Basilisque. Il vit en rêve ce saint qui l’invitait à le rejoindre le lendemain. En effet, le lendemain, il se trouva plus mal. Malgré ses plaintes, ses gardiens exigèrent qu’il ve mit en route et précipitèrent le départ. Mais au bout de quelques milles, le pauvre évêque était en un tel état que force fut de revenir à la petite chapelle. Il y mourut le jour même (14 septembre 407). « Gloire à Dieu en toutes choses ! » telles furent les dernières paroles qui sortirent de la bouche d’or. L. Duchesne, Histoire ancienne de l’Église, t. iii, p. 104.
La mort de Jean ne ramena pas immédiatement la paix à Constantinople. Ses partisans continuèrent leur schisme. Il fallut que le nom du saint patriarche fut rétabli sur les diptyques pour que le pape consentit à rendre sa communion à Atticus et à ses amis. Mais les johannites ne furent complètement satisfaits que lorsque le 27 janvier 438 les restes de leur évêque bienaimé eurent été ramenés dans la capitale et déposés triomphalement dans l’église des Saints-Apôtres. Théodoret. Hist. lùcL.x. 36 ; P. G., t. lxxxii, col. 1265-1269. Ainsi se trouvait réhabilitée la mémoire du vaillant lutteur, qui avait tant souffert par la liberté de l’Église.
II. Les écrits de saint Jean Chrysostome. — 1o Diffusion et tradition de l’œuvre littéraire de Jean. — L’héritage littéraire de Jean est immense. Aucun Père de l’Église grecque, Origène excepté, n’a autant écrit que lui, ou autant dicté. La plupart des homélies en effet n’ont pas été écrites par Jean, mais simplement recueillies telles qu’elles étaient prononcées par des sténographes et l’on trouve encore dans plusieurs d’entre elles des notes ou des remarques dues à ces scribes. Cf. S. Ilaidacher, dans Leilschrifl fur katholische Théologie, 1907, I. xxxi, p. 1 42 sq. ; A. Wikenhauser, Der hl. Chrysostomus und die Tachygraphie dans Archiu fur Sténographie, 1907, t. lviii, p. 268 sq.
De très bonne heure, les œuvres de Jean se répandirent partout. Saint Jérôme leur plus ancien témoin peut écrire en 392 dans le De vir. ill. 129, P. L., I. xxiii, col. 754 : Joannes, Antiochenæ ecclesim presbyter, Eusebii Diodorique seclator multa componere dtcitur, de quibus περὶ ἱερωσύνης tantum legi. Palladius place sur les livres de Théodore cette formule : « Je le connaissais non seulement de renom mais encore par ses traités, ses homélies et ses lettres, συγγράμματα, ὁμιλίαι, ἐπιστολαί, qui nous étaient parvenus. » Dialog., 12 ; P… t. i.vn. col. 40. En Orient, comme en Occident, on lit ces écrits, on les cite, on les regarde comme taisant autorité : les florilèges patristiques en rapportent de nombreux fragments, et il est curieux de noter que c’est Cyrille d’Alexandrie, le neveu et le successeur de Théophile, qui. pour la première lois, en 429 OU 130, tire un argument doctrinal d’un texte de Jean. De recta fuie ml reginas, i, P. (.’.. t. lxxvi, COl. 1216. A l’envi, papes et conciles se réclament du grand orateur. Le IIe concile de Nicée en 787 va jusqu’à proclamer : « Si Jean Chrysostome parle ainsi des images, qui donc osera encore parler contre elles ? i Mansi, Coneil., i. xiii. col. 8. Dès le vr siècle, le nom de Chrysostome sert à désigner l’auteur éloquent de tant livres parfaites ; au xie siècle, peut-être au x". Jean figure a côté de saint Basile et de saint Grégoire de Nazianze comme un des trois hiérarques quel’Église grecque honore d’une fête spéciale.
Cette popularité ne fut pas le résultat d’une vogue passagère. Elle se maintint le long des siècles, ainsi qu’en témoigne le nombre exceptionnellement considérable de manuscrits qui nous ont transmis les de Jean. Dans les catalogues imprimes des grandes bibliothèques, Baur a relevé 1917 manuscrits copiés du viiie au xvie siècle et dont chacun contient au moins un sermon du prédicateur, dont la plupart sont même exclusivement consacrés à ses ouvrages. La seule Bibliothèque nationale de Paris possède 455 de ces mss. Il faudrait ajouter encore, a tant de témoins, les chaînes scripturaires ou les florilèges dogmatiques, pour qui Jean constitue souvent la principale autorité, et qui manifestent à leur manière l’extraordinaire diffusion de ses écrits.
En même temps que l’on copiait le texte grec des livres de Chrysostome on le traduisait dans la plupart des langues chrétiennes. Entre 415 et 419, le pélagien Anianus donne une version latine des sept homélies sur saint Paul, de l’homélie Ad neophytos, qui a été éditée par S. Haidacher, Eine unbeachtete Rede des hl. Chrysostomus an Neugetaufte, dans Zeilschrift fur katholische Théologie, 1904, t. xxxviii, p. 168193, une série d’autres homélies marquées dans les premières éditions latines comme étant l’œuvre incerti inlcrpretis, enfin vers 419 les 25 premières homélies sur saint Matthieu. Chrysostome Baur, L’entrée littéraire de saint Chrysostome dans le monde latin dans Revue d’Histoire ecclésiastique, 1907, t. viii, p. 249-265 ; A. Yilmart, La collection des 38 homélies latines de saint Jean Chrysostome, dans Journal of theological Siudies, juillet 1918, t. xix, p. 305 sq. Peut-être est-ce au même Anianus que l’on est redevable de la traduction de trois opuscules : De compunctione, De reparatione lapsi, Quod nemo lœditur nisi a scipso. Au vre siècle, sur l’ordre du Cassiodore, Mutianus traduit encore les 34 homélies sur l’épître aux Hébreux, Institutiones, i, 8, P. L., t. lxx, col. 1120, et peut-être les 55 homélies sur les Actes des apôtres, ibid., col. 1122. La version latine des deux écrits Ad Theodorum lapsum est anonyme, mais certainement très ancienne.
On sait jusqu’à présent peu de choses des traductions de Jean, en armémien, en syriaque ou en copte. Les versions syriaques surtout, dont l’existence est assurée, demanderaient une étude détaillée. Cf. J. S. Assémani, Bibliotheca orientalis, t. iii, pars 1, p. 24 sq. ; W. Wrigth, Catalogue oj the syriac mss in the British Muséum, 1872, t. iii, Index, sub verbo.
Sur la diffusion des écrits de saint Jean Chrysostome dans l’Eglise grecque et dans l’Église latine, il faut consulter surtout l’étude de Chr. Baur. Saint Jean Chrysostome et ses œuvres dans i histoire littéraire. Essai présenté à l’occasion du XV’centenaire de Saint Jean Chrysostome, Louvain et Paris. 1907, p. 3-82. Cet ouvrage pourrait sans doute être perfectionné : tel qu’il est. il renferme une foule de renseignements précieux pour l’histoire littéraire de Jean. On complétera l’ouvrage de Baur pour ce qui regarde les littératures arménienne, arabe, russe et géorgienne par les études di’A. Aucher, C. Bâcha, A. l’almicri, M. Tamarati, dans Χρυσοστομιϰά, Studie ricerche intorno a S. Giovanni Crisostomo, a cura del comitato per il XV" centenario délia sua morte Rome, L908, fasc. i. p. 143-216.
L’ouvrage de Chr. Baur, S’. Jean Chrysostome et ses œuvres dans l’histoire littéraire, donne une longue et curieuse liste des éditions grecques (31>7), latines (297). allemandes ( 16), anglaises (50), arabes (3), arméniennes (8), bohémiennes (1 1). bulgares (2). coptes (3). espagnoles) » françaises (94), glagolitiques (2), hollandaises (5), hongroise (1), Italiennes ( H>), polonaises (3). russes (3). ruthènes (1). slaves (4), suédoise (1), turque (1). valaque’1), parues jusqu’en 1908 (p. 82222). Sur les éditions courantes voir la bibliographie.
Malgré le grand nombre de ces éditions, on peut dire qu’un immense travail reste à faire pour donner enfin un texte exact et sûr des œuvres de Jean. La critique des manuscrits n’a pas été, jusqu’ici, tentée de manière scientifique ; beaucoup d’entre eux, et non des moins