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JEAN PHILOI’mn


doctrine aristotélicienne ! et dans ses commentaires sur la physique d’Aristote, il lui arriva souvent de reproduire les leçons de son maître. Toutefois, il ne s’attacha pas d’une manière exclusive aux théories aristotéliciennes : et dans bien des cas. il sut leur préférer celles de Platon ou celles des stoïciens. Ce fut surtout en matière scientifique qu’il manifesta l’indépendance de son esprit : son traité sur l’éternité du monde est dirigé contre Troclus, dont il réfute l’un après l’autre les dix-huit arguments ; et jusque dans lès commentaires sur la physique, il insère de fréquentes digressions pour combattre l’opinion péripatéticienne ; particulièrement remarquables sont les développements qu’il apporte ainsi sur le temps et le lieu, sur le plein et le vide, sur la chute des corps, etc. Cf. P. Duhem, Le me du monde. Histoire des doctrines cosmologiques

Platon à Copernic. Taris, 1913, t. i, p. 313-321 ; 156 ; 361-371. Aussi ne faut-il pas s’étonner que les théories de Jean aient été fréquemment combattues par les aristotéliciens fidèles, en particulier par Simplicius, dont il avait été le condisciple à l’école d’Ammonius, et qui devint l’un de ses principaux adversaires.

Le savant philosophe était chrétien. Tous les témoignages sont unanimes à l’affirmer. Mais il ne devint jamais évêque ; et en particulier il ne fut pas évêque d’Alexandrie, comme l’écrit encore, sans fournir aucune preuve Ph. Meyer dans la Realencyclopùdie de Hauck, t. ix, p. 310. Il fut même un chrétien d’une espèce à part : pour lui l’enseignement de l’Église doit être prouvé au moyen des arguments de la philosophie ; c’est donc en partant des définitions fournies par les philosophes qu’il s’efforce de reconstruire les dogmes de la Trinité et de l’Incarnation. Il aboutit de la sorte à des théories hérétiques ; car sous prétexte que la nature n’existe pas en dehors des individus, il conclut que dans le Christ l’humanité n’est pas une personne, puisqu’elle n’a jamais existé d’une manière indépendante et que par suite elle n’est pas davantage une nature : il n’y a donc dans le Christ d’autre nature que la nature divine ; et Jean rejoint ainsi les monophysites. D’autre part, puisqu’il y a en Dieu trois personnes, il y a aussi trois natures divines ; et l’on arrive par là au tritheisme. Cf. Léonce de Byzance, De sectis, Act., v, 6, P. G., t. lxxxvi a, col. 12321233. Ces théories une fois construites, Jean les confirme d’ailleurs par des témoignages patristiques : au dire de Photius, on trouvait dans son livre contre Jean de Constantinople des citations empruntées à saint Grégoire de Xazianze, à saint Basile, à saint Athanase, à saint Cyrille d’Alexandrie. Cod. 75, P. G., t. ciii, col. 240.

II. Ses Œuvres. — Les œuvres de Jean Philopon sont très nombreuses et très variées ; elles embrassent

i peu près tous les genres de l’activité intellectuelle.

On peut les grouper sous quatre chefs principaux : écrits grammaticaux, philosophiques, scientifiques, théologiques. Ce sont naturellement ces derniers qui nous intéressent surtout ici.

Ecrits grammaticaux.

Jean avait été à l’école

du grammairien Romanos ; ce fut auprès de lui qu’il s’initia aux travaux de grammaire et de lexicographie. On lui doit un traité intitulé Tovucà Tzapiyyityuxxa, édité avec l’ouvrage d’Hérodien rcepl nyi)[ii-c, rj, W. Dindorf, Leipzig, 1825, et un écrit en forme de lexi que, qui fut grandement répandu au moyen âge : r.zz Jux<p6pax ; Tovwjiévcov xat 8u£q>opcc ai)quuv6vT<av, édit. P. Egenolff, Breslau, 18K0. Les deux ouvrages se complètent mutuellement ; et ils paraissent bien avoir ime point de départ, la xvoOXudj d’Heredianos ; ils sont par suite utiles pour aider à reconstituer cette œuvre perdue. Cf. A. Ludwich, De Joanne Philopono grammatico, Kônigsberg, 1888-1880.

Écrits philosophiques.

Les écrits philosophiques

DICT. DE THÉOL. CATHOL.

de Jean Philopon sont essentiellement des commentaires des livres d’Aristote. Ces commentaires sont d’ailleurs remarquables par l’originalité de vues dont ils témoignent. D’une manière assez fréquente, Jean abandonne la physique du péripatétisme pour exposer et défendre les théories stoïciennes, dont il est au début du vi 1’siècle le plus brillant propagateur. Voici les titres des principales exégèses de Jean.

1.’Icoàvvjo Ypao.o.otTtxoî’AXe^avSpétoç toQ quLoir6v-ju sa tcùv ouvouoiûv’A(X(i CO vCou toû’Epixeiou axo/wal à-ocrr, ji.eicô<Tei ; si ; tàç’ApiOTOTéXouç Sexà xaT^Yopta ;. Cf. Fabricius-Harles, Ribliolh. græca, t. x, p. 645.

2. In Analijlica priora cxoXixocl ùnoir^eiÛGeiç èx

TCÔV OUVOUOtÛV’AfiJACOVlGl) ToG’Epp^tOU [LS-OL TWCOV

tSuov èTUCTTâaecov, édit. V. Trincaveli, Venise, 153(>.

3. 7/i Analytica posleriora, etc., édit. V. Trincaveli, Venise, 1534.

l.’Icoavv^u Ypa[A[&x7t>coij Û716fi.vr)|i.a zlç ~à jtepl cpusi-y. r t ç Téaoapa rcpcoTa (3t.pXta toù’AptaToréXou ;. Ioannis grammatici in primos quatuor Arislolelis de naturalis auscullatione libros commentaria, édit. Trincaveli, Venise, 1535. De cette édition grecque, Girolamo Doroteo de Venise donna une traduction latine en 1539(7), puis en 1542. Une seconde traduction latine, qui n’était d’ailleurs qu’une revision complète de la précédente parut en 1569 à Venise, par les soins de Giambattista Rassario, médecin à Novare. Cf. P. Duhem, op. cit., 1. 1, p. 314, note 5. La plus récente et la meilleure édition grecque du commentaire sur la physique est celle qui a paru dans la collection des Commentaria in Aristotelem græca, Berlin, 1887 sq., t. xvi et xvii, par les soins de J. Vitelli. Cet ouvrage, ignoré à ce qu’il semble, des écrivains occidentaux du moyen âge, est l’un des plus importants qui soient pour nous faire connaître les théories physiques en vogue à l’époque de son auteur. Nous en possédons les quatre premiers livres en entier, et des fragments assez peu considérables des quatre derniers.

5. In librum primum meleororum libri III, Venise, 1551.

6. In libros très de anima commentarii [ubi libri singuli in T[AY)fjU3CTa, commentarii ipsi in ôecoptaç sive Jusiores disputationes et r : pà^ei ; sive lecliones verba philosophi brevi explications illustrantes a Philopono divisi fuerant] édit. V. Trincaveli, Venise, 1553.

7. In libros duos de gencratione et inleritu, cum prœfatione Fr. Asulani, Venise, 1527.

8. In libros quinque de generalione animalium scholia Philoponi. L’authenticité de ce dernier commentaire est au moins douteuse. Harles, Biblioth. græca, t. x, p. 647, note y, les attribuerait plutôt à Michel d’Éphèse.

9. In libros X I V metaphijsicorum [êÇ’WYTfjætc, twv y.z-à Ta cpuaixà’ApiaTOTsÀou ; àr.o toû $iXo7t6vou’Icoâvv^u] latine interpretavit Fr. Patricius, Ferrare, 1583.

Cette longue énumération suffit à montrer l’activité de Philopon. Il n’est pas impossible que l’authenticité de l’un ou de l’autre des derniers commentaires cités doive être définitivement rejetée ; mais il reste que notre auteur, est à compter parmi les plus importants exégôtes de l’œuvre aristotélicienne.

Écrits scientifiques.

On cite sous le nom de

Jean Philopon deux livres de science pure : un traité Sur l’astrolabe, édit. H. Hase, dans Rheinisches Muséum, 1839, t. vi, p. 127-171 ; et un commentaire sur le premier et le second livre « le l’arithmétique de Nicomaque de Gérasa ; édit. Rich. Hoche, 2 fasc, Leipzig, 1864 ; Berlin, 1867.

i" Écrits théologiques. Les œuvres théologiques de Philopon sont assez variées. L’écrivain s’intéresse a tous les sujeis, depuis la création du monde jusqu’à la résurrection des morts ; depuis les statues des idoles jusqu’à la nature divine.

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