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M -US-CHRIST CHEF D h’SON CORPS MYSTIQUE

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hommes, laquelle nous vient fin Christ par l’Église et dans l’Église ; le corps, qui est l’organisme visible auquel nous appartenons par le baptême, tant que nous ne brisons pas les liens extérieurs de la foi et de la communion catholiques. Voir Église, t. iv, col. 2150 sq. Or, pour recevoir la vie de la grâce communiquée par Jésus-Christ, en d’autres termes, pour être membre vivifié par la tête dans le corps mystique du Christ, il suffit d’appartenir à l’âme de l’Église. Ces remarques faites, passons aux conclusions théologiques.

2. De quels hommes Jésus-Christ est-il le chef en acte, quant à la communication de la vie surnaturelle ? — Voici la réponse de saint Thomas : « Le Christ est le chef, d’abord et principalement de ceux qui lui sont unis en acte par la gloire ; deuxièmement de ceux qui lui sont unis en acte par la charité ; enfin de ceux qui lui sont unis en acte par la foi » (sans la charité), loc. cil. — a) La première considération se justifie pour un double motif : l’union des élus au Christ dans la gloire est immobile et définitive ; de plus, elle exclut l’influx extérieur qui existe ici-bas, dans le gouvernement de l’Église visible, de la part îles chefs établis par le Christ, pape et évêques, sur les simples fidèles : dans le ciel, l’Église triomphante sera régie par le seul Christ, son unique chef. Cf. S. Thomas, loc. cil., a. 6. — b) Si tous les hommes, unis au Christ par la charité, sont les membres du Christ, il s’ensuit immédiatement que tous les justes, sans exception, doivent être réputés tels. Cf. Conc. Trid., sess. vi, ean. 32, Denzinger-Bannwart, n. 842. Et, par conséquent, il faut compter dans ce nombre tous les hérétiques et schismatiques de bonne foi qui, vivant de la vie de la grâce, appartiennent à l’âme de l’Église. S’ils sont hérétiques notoires, ils ne font plus réellement partie du corps de l’Église ; mais ils appartiennent toujours au corps mystique du Christ, puisqu’ils sont de l’âme de l’Église et, par le fait même, ont le désir de faire partie de son corps. Bien plus, il faut, en vertu du même principe, considérer comme membres actuels du Christ tous les justes non baptisés, catéchumènes ou non. Cette dernière assertion n’est pas suffisamment mise en relief par les théologiens, qui ont tendance à confondre le corps du Christ et le corps de l’Église ; mais elle s’impose. Elle n’est point contredite par le concile de Florence, déclarant dans le décret pro Armenis que « par le baptême, nous devenons membres du Christ et cillions dans le corps de l’Église. L’affirmation, quant au premier elïet signalé, n’est pas exclusive. Dcnzingcr-Bannwarl. n. 696. Ces conclusions demeurent valables qu’il s’agisse des hommes qui oui vécu avanl le Christ depuis le commencement du monde ou des justes qui, actuellement placés sous l’influence vivifiante du Christ ne persévéreront pas, et seront finalement damnés. c) Bien que ne vivanl pas de la vie surnaturelle de la (/nier, tous ceux qui possèdent la vertu surnaturelle de /< ; i, sans la charité, participent déjà, d’une certaine manière, à la vie surnaturelle. Voir Foi, t. vi. col. 84-88. D’ailleurs les définitions du concile du Vatican ne nous laissent aucun doute à ce sujet. Sess. m. e. m. De fuie et ean.. r >, Denzinger.-Bannwart, n. 1791 ; 1814. Cf. Conc Trid., sess. vi, c.vifibid., n. 798. Ces i fidèles » sont donc déjà, en acte, quoiqu’en un degré inférieur (puisque pai hypothèse, ils ne vivent pas encore de la vie de la grâce) les membres du Christ. Ce principe nous pei met d’affirmer un certain nombre de déductions théologiques communément admises. ot.Le Christ est, en . le chef des fidèles catholiques pécheurs. I.’opinion conl raire a été attribuée, à tort semble-t-il au cardinal Torquémada, lequel, dans ta Summa de Ecclesia et de ejus auctorilate, I. 1, c. vui, n. 7 ; e. xi, n. (i, déclare simplement les pécheurs fidèles des membres Impai

faits du Christ : elle est plutôt de Melchior Cano, De locis, t. IV, cap. ultimo, ad 9’U", s’appuvant sur saint Thomas, In IV Sent., t. III, dist. XIII, q. ii, a. 2, qu. ii, pour distinguer entre « membres » et « parties » de l’Église : les fidèles pécheurs seraient des parties, non des membres de l’Église. Voir la discussion dans Gonet, disp. XIV, a. 2, §1 et dans les Salinanlicenses, disp. XVI, dub. iii, § 3. — b. Le Christ est le chef, en acte, des schismatiques formels non hérétiques (si tant est que cette hypothèse puisse se réaliser concrètement ) : bien que séparés de l’Église quant au lien de la charité, ces schismatiques gardent encore le lien de la foi. — c. Le Christ est le chef, en acte, des fidèles excommuniés qui, quoique pécheurs, gardent la foi théologique : a fortiori serait-il le chef, en acte, des fidèles excommuniés qui, dans leur for interne, vivent de la vie de la grâce et sont justes devant Dieu. — d. Le Christ est le chef, en acte, des hérétiques purement matériels, qui n’ayant jamais commis volontairement et sciemment de faute formelle contre la foi, peuvent retenir en leur âme la vertu surnaturelle de foi sans la charité… Voir Hérésie, Hérétique, t. vi, col. 2219-2220. — e. Il faut en dire autant à l’égard des catéchumènes qui ont pu, justifiés avant le baptême par la charité parfaite, posséder la vertu de foi et perdre ensuite par le péché mortel, la vie de la grâce. Faut-il affirmer que le Christ est, en acte, le chef des non-baplisés qui, tout en demeurant pécheurs, n’ont jamais possédé la vertu de foi mais produisent, sous l’influence de la grâce actuelle, des actes de véritable foi surnaturelle ? Bien cpie les théologiens n’aient pas envisagé spécialement ce cas particulier, nous n’hésitons pas, en vertu des principes posés par les conciles de Trente et du Vatican, à répondre affirmativement.

Mais par contre, faut-il refuser à tous les hommes vivant dans l’infidélité, le droit d’appartenir en acte, à un degré si infime que ce soit, au corps du Christ ? La réponse affirmative est donnée, sans aucun tempérament, par les théologiens qui, connue Gonet et les Salinanlicenses, admettent que tout péché formel d’infidélité, soit notoire, soit simplement occulte, retranche de l’âme et du corps de l’Église ceux qui s’en sont rendus coupables. Gonet, loc. cit., n. 14-17 ; Salmanticenses, loc. cit., n. 43 sq. Mais selon l’opinion plus probable de Bcllarmin, Controversiarum, De conciliis, t. III, De Ecclesia militante, c. x, les hérétiques occultes, quoique formels, demeurent encore membres du corps de l’Église. Voir Église, t. iv, col. 2102-2163. La conclusion semble donc s’imposer, pour eux du moins, que le Christ est encore, en acte, quoique dans un degré très infime, leur chef. Bellarmin, loc. cit., fait observer avec justesse que la forme du corps visible de L’Église n’est pas la foi théologique pure et simple, mais la profession extérieure de la foi reçue au baptême. Or, tant que les infidèles occultes gardent celle profession extérieure de la foi, on ne peut pas dire qu’ils sont totalement soustraits à l’action vivifiante du Christ. Quant aux autres hérétiques formels (et il faut en dire autant pratiquement fies schismatiques formels), aux apostats et aux infidèles proprement dit, ils ne peuvent, à aucun titre, revendiquer le titre de membres du Christ en acte.

.’t. De quels hommes Jésus-Christ est-il en puissance, /c chef, quant à lu communication de lu nie surnaturelle ? la réponse est simple, el n’est que la conclusion de ce qui précède. Jésus est, en puissance seulement, le chef de tous les hommes, encore dans l’état de voie, mais qui ne sont pas vivifiés.surnaturellenient tout au moins par la foi. connue il vient d’elle expliqué.

Et nous rejetons par là l’affirmation trop absolue de quelques théologiens et canonistes, qui, comme Castro Palao, De justa hæreticorum punitione, c. xxiv, soutiennent qu’il suffit d’avoir été baptisé pour demeurer.