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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 8.2.djvu/131

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    1. JUDE (ÉPITRE DE)##


JUDE (ÉPITRE DE), CANONICITÉ

1672

Épiphane, du commentaire de Didyme sur les sept épîtres canoniques. Si l’épître n’est pas mentionnée dans le canon africain de Mommsen, vers 350, elle se trouve dans la liste du IIIe concile de Cartilage, 397.

Clément d’Alexandrie avait commenté brièvement l’épître de Jude dans les Hypotyposes, comme nous l’apprend Eusèbe, H. E., t. VI, c. xiv.n.l, P. G., t. xx, col. 549. La substance de son commentaire se retrouve dans les Adumbrationes de Cassiodore ; cf. P. G., t. ix, col. 72 ! i-734 : P. L., t. lxx, col. 1375-1378. En outre, il cite l’épître dans Pœd., iii, 8, P. G., t. viii, col. 616, cf. Jud., 5, 6, 11 ; Strom., iii, 2, ibid., col. 1112-1113, cf. Jud., 8-16 ; lbid., vi, 8, t. ix, col. 288, cf. Jud., 22, 23. Ainsi, à la fin du n c siècle l’épître de Jude était reçue dans les Églises d’Antioche, de Rome, d’Afrique et d’Alexandrie.

2. L’É pitre de Jude aux IIIe et IVe siècles. — Origène, In Matth., xvii, 30, P. G., t. xra, col. 1569, annonce en ces termes une citation de Jud., 6 : « eî Se y.a.1 tt ( v’IoûSa 71p6aoiT6 tiç ! 7uaToXy)v » ; lbid., x,

17, col. 877, il fait l’éloge de l’épître et rappelle l’auteur en citant le vers. 1 : « Jude a écrit une courte épître, mais remplie des fortes paroles de la grâce céleste ; c’est lui qui a dit dans l’exorde : Jude, serviteur de Jésus-Christ, frère de Jacques. » Origène la cite encore In Matth., xv, 27 col. 1333 ; In Joan., xiii, 37, t. xiv, col. 464, cf. Jud., 6.

Dans la traduction latine de ses œuvres, Jud., 6 est cité comme « écriture sacrée », In Ep. ad Rom., iii, 6 ; t. xiv, col. 939 ; dans le même commentaire, v, 1, l’épître est attribuée à l’apôtre Jude, t. xiv, col. 1016 ; cf. In Ezech., Hom. iv, 1, P. G., t. xiii, col. 697. Jud. 8-9 est cité dans la Lettre aux Alexandrins dont saint Jérôme a conservé un fragment dans Apol. cont. Rufinum, ii,

18, P. L., t. xxxiii, col. 461. Dans le De principiis III, ii, 1, on lit : De quo in Adscensione Mosis, cujus libelli meminil in epistola sua apostolus Judas, P. G., t. xi, col. 303.

Ainsi Origène n’a aucun doute sur l’authenticité et la canonicité de l’épître. Le passage In Matth., xvii, 30 indique seulement qu’il connaissait des gens qui en avaient ; mais, ces doutes, il ne les partage pas lui-même. Eusèbe, il est vrai, ne mentionne pas l’épître dans le canon d’Origène qu’il nous a conservé, H. E., VI, xxv, P. G., t. xx, col. 582-584, mais c’est probablement une négligence de sa part, car il mentionne des livres qui étaient fortement discutés, comme II Petr. et II et III Joa. Origène était attiré vers l’épître par des raisons qui pouvaient en écarter d’autres, c’est-à-dire la doctrine concernant les anges.

D’après Didyme d’Alexandrie, l’épître était rejetée parce qu’elle faisait usage d’écrits apocryphes. Didyme la commente et défend son autorité. P. G., t. xxxix, col. 1811-1818.

Eusèbe, II. E., II, xxiii, 25, P. G., t. xx, col. 205, dit au sujet de l’épître de Jacques. « Il faut savoir que, comme elle est illégitime, voÔeûeTai.peu d’anciens la mentionnent, comme celle qui porte le nom de Jude, celle-ci élant également une des sept appelées catholiques. Cependant nous savons qu’elles sont lues publiquement avec les autres dans la plupart des Églises. » En assimilant l’épître de Jude à celle de Jacques, qu’il qualifie d’ « illégitime », Eusèbe semble donner son opinion personnelle. Le fait que « peu d’anciens les mentionnent » le porte à les regarder l’une et l’autre comme illégitimes ; mais il avoue que la plupart des Églises les reconnaissent comme des autorités. Aussi, dans un autre passage, II. E., III, xxv, .’i, col. 269, au risque de se mettre en contradiction avec lui-même, il les place au nombre des 7.vn}.eyô|j<.£va, qu’il dislingue expressément des vôOc, illégitimes.

Saint Jérôme, De viris ill., 1, P. L., t. xxiii, col. 613, attribue l’épître à « Jude, frère de Jacques > et la range parmi les sept épîtres catholiques. Mais il ajoute qu’elle est rejetée par la « plupart » a plerisque, parce que l’auteur apporte le témoignage du livre d’Hénoch qui est apocryphe. Cependant il dit que grâce à son antiquité et par suite ds l’usage elle a acquis de l’autorité, et qu’elle est comptée parmi les livres saints. Saint Jérôme, dans cette notice, ne donne point à l’auteur la qualité d’apôtre ; il s’en tient au renseignement fourni par l’épître elle-même : Judas frater Jacobi. D’ailleurs ce qu’il dit relativement à l’acceptation de l’épître dans les Églises ne s’accorde point avec la notice d’Eusèbe. Celui-ci, en effet, dit qu’elle est reçue dans la plupart des églises, tandis que d’après saint Jérôme, elle est rejetée par la plupart. Si l’auteur du De viris n’a pas exagéré, il faut admettre que de son temps on éprouvait plus de répugnance à accepter l’épître qu’au temps d’Eusèbe. D’ailleurs il en donne la raison : l’épître cite le livre apocryphe d’Hénoch. A mesure que ce livre tomba en discrédit, on fut porté à rejeter aussi l’épître de Jude qui paraissait l’invoquer comme une autorité. Il convient d’ailleurs de remarquer que toute l’argumentation précédente suppose que plerisque a toujours dans S. Jérôme le sens de « la plupart ». Or il n’est pas impossible que dès cette époque le sens de plerisque ne se soit atténué, comme il le fera certainement plus tard, au point de signifier simplement « plusieurs ».

L’épître ne fut pas acceptée d’une façon générale dans l’Église de Syrie. Théophile d’Antioche, que nous avons déjà cité, y fait une allusion qui nous paraît indiscutable ; mais elle n’est pas dans la Peschitto. Elle est tout entière dans le Sermo contra impudicos de saint Ephrem, mais non dans le texte syriaque. Cf. Studia biblica, Oxford, 1891, t. iii, p. 105-138. Elle n’est ni dans la Doctrine d’Addaï, ni dans les Homélies d’Aphraate. Elle n’est pas donnée non plus dans les ïambes à Séleucus, P. G., t. xxxvii, col. 1597, attribués à saint Amphiloque, évêque d’Iconium, vers 374. Un passage de la lettre des évêques condamnant Paul de Samosate, Eusèbe, H. E., VII, xxx, 4, édit. Schwartz, Leipzig, 1908, t. ii, p. 706, semble faire allusion au ꝟ. 3 ; mais le texte en est difficile à établir, cf. P. G., t. xx, col. 712.

Elle ne paraît pas citée dans l’œuvre de saint Jean Chrysostome et de Théodoret. Un passage de la Synopsis sacrarum Scriplurarum attribuée à saint Jean Chrysostome, mentionne ex catholicis très epistolse. Il s’agit des trois grandes épîtres catholiques, Jac., I Petr., I Joa. Le passage laisse entendre qu’il y en avait d’autres qui étaient délibérément omises, P. G., t. lvi, col. 317, etc.

Théodore de Mopsueste rejetait l’épître de Jude avec Jac, II Petr., II et III Joa., cf. Léonce de Byzance, P. G., t. lxxxvi, col. 1365. Mais il n’avait souvent d’autre critérium de canonicité que son sens propre. Junilius, qui était de l’école de Théodore de Mopsueste regarde l’épître de Jude comme mediie auelorilalis. Cf. H. Kihn, Theodor von Mopsuestia und Junilius Africanus, Fribourg-cn-Brisgau, 1880, et Junilius, col. 1971. Nous trouvons l’épître dans la version syriaque Philoxénienne-Harcléenne, double recension d’une version du vi° siècle. Elle est dans la liste des écritures du concile de Cartilage en 397, et dans la lettre d’Innocent I er à Kxupère évêque de Toulouse en 405. A partir de ce moment le canon est officiellement fixé dans l’Église latine.

En somme, si nous exceptons l’Église syrienne. l’épître était reconnue partout à la fin du iv° siècle. Si l’on tient compte de son peu d’étendue, de son sujet particulier, qui ne se prêtait pas beaucoup aux citations, il faut estimer qu’elle est attestée (l’une façon