1761 JUGEMENT. DONNÉES DE L’ÉCRITURE : NOUVEAU TESTAMENT 1762
témoignage formel et propre à exclure toute hésitation. Sans doute serait-il excessif de prétendre, comme on l’a fait, que cette doctrine est étrangère à l’Apôtre, mais les textes ne permettent pas de prouver qu’elle s’affirme chez lui d’une manière explicite. Tout au plus peut-on dire qu’elle est dans la logique de sa pensée. « Il ne nous parle pas non plus du jugement particulier… Mais ce discernement immédiat est dans la nature des choses et il ressort de ce fait que ni le bonheur des élus, ni, par analogie, le supplice des réprouvés n’est différé jusqu’à la parousie. » Prat, op. cit., p. 497-498. « Cette pénurie de détails sur les choses de l’au-delà, dit sagement le même auteur, ne doit pas nous surprendre, tout l’intérêt de l’Apôtre convergeant vers le fait de la résurrection et cette vérité capitale que les justes sont unis intimement au Christ dans la mort comme dans la vie. » A l’exemple de Jésus son maître, Paul a concentré son attention sur l’essentiel, savoir nos destinées éternelles et la certitude qu’un jugement divin les fixera suivant nos mérites. Pour le reste, il semble s’être fait une règle d’observer le suprême avertissement du Christ, Act., i, 7 : Où^ ûfiûv ècmv yvcôvai xpôvouç 73 y.oapoùç oûç ô roxTrjp sŒto èv tîj ESîa èÇouata.
/II. DOCTRINE DES AUTRES APOTRES. — En dehors
de saint Paul, les autres écrits néo-testamentaires n’offrent guère d’élément nouveau.
1° Épître de saint Jacques.
Toute morale dans
son objet, cette épître insiste sur les œuvres et sur leurs rétributions. « Approchez-vous de Dieu, et il s’approchera de vous. » iv, 8. Les riches orgueilleux seront dépouillés, 1, 10-11 ; car leurs injustices crient vengeance devant le Seigneur et leur amassent un trésor qui sera liquidé « dans les derniers jours ». v, 3. Au contraire, celui qui aura soull’ert l’épreuve recevra « la couronne de vie ». 1, 12 ; cꝟ. 11, 5. Par moments, il semble que la loi divine s’élève à une sorte de personnification qui lui permet de convaincre le pécheur qui la viole. 11, 9. Mais, en réalité, c’est Dieu qui est « l’unique législateur et juge, qui a le pouvoir de sauver et de perdre. » iv, 12. C’est lui qui réserve « un jugement sans pitié à celui qui n’a pas eu de pitié, » 11, 13, et une plus sévère justice à ceux qui par leur fonction acquièrent plus de responsabilité, ni, 1.
Il ne s’agit d’ailleurs pas d’un acte divin quelconque : ce jugement se confond avec la « parousie du Seigneur », que l’Apôtre exhorte ses lecteurs à attendre avec confiance, à l’exemple de l’agriculteur qui attend de récolter le fruit de son travail. « Prenez donc patience, vous aussi ; fortifiez vos cœurs, parce que la venue du Seigneur approche. Ne murmurez pas, frères, les uns contre les autres, afin de n’être pas jugés ; car voici que le juge est à nos portes. » v, 6-8. Tel est, sans vaines spéculations, le thème d’ordre exclusivement pratique et d’inspiration hautement morale qui commençait à consoler et stimuler les chrétiens du premier jour, comme il console et stimule encore ceux d’aujourd’hui.
2° Épîlres de saint Pierre. — Ici également c’est la note morale qui domine ; mais elle entraîne déjà plus de considérations dogmatiques.
L’Apôtre écrit à des fidèles éprouvés pour leur procurer consolation et réconfort, I Petr., 1, 6-7, à des fidèles observés et persécutés par un monde hostile pour leur rappeler les obligations de leur foi. iii, 14-15 et iv, 13-16. Une des pensées les plus efficaces à cette double fin est celle du jugement. Car les chrétiens invoquent pour père « celui qui juge sans acception de personnes suivant l’œuvre de chacun. » 1, 17. « Ses yeux sont sur les justes et ses oreilles s’ouvrent à leurs prières ; mais son visage est sur ceux qui font le mal. »
m, 12 ; cf. Ps., xxxiv, 16-17. Personne n’échappe à sa justice et c’est sa propre maison qu’il visite la première. « Si donc il commence par nous, quel sera le sort de ceux qui qui ne croient pas à son Évangile ? Et si le juste se sauve à peine, l’impie et le pécheur que deviendront-ils ? » Ibid., iv, 17-18. Ce jugement divin sera l’œuvre spéciale du Christ, qui est le « juge des vivants et des morts ». auquel tous les infidèles devront rendre leurs comptes, iv, 5. Voilà pourquoi les chrétiens sont instamment invités à ne pas perdre de vue ce jour où éclatera la révélation de sa gloire, èv àTCoxxXô^Ei.’Ivjaoij XpwToû. 1, 8 et 13 ; cf. iv, 13 et v, 1. Tout cela ne peut évidemment s’entendre que du jugement final.
Néanmoins, « le jour du Seigneur » tardait à se manifester : la deuxième épître de saint Pierre a pour but de répondre au scandale provoqué par ce retard, m, 3-4. Voilà pourquoi l’auteur commence par rappeler les grands exemples de la justice divine dans le passé : châtiment des anges rebelles, déluge, destruction de Sodome et de Gomorrhe, tous faits qui prouvent que Dieu sait sauver les justes et punir les méchants. 11, 3-9. Il en sera de.même à l’avenir et, après un temps de patience qu’il prolonge par miséricorde, Dieu aura son jour, qui sera « un jour de jugement et de ruine pour les impies, » ni, 7 ; cꝟ. 11, 12, en même temps qu’il marquera la fin du monde au milieu d’effroyables catastrophes, iii, 7-13.
Chemin faisant, l’Apôtre précise que les anges coupables, « réservés pour le jugement, » sont déjà enfermés dans le « tartare », asipotç Çocpoo xapTapcÔTaç — - seul exemple biblique de cette expression, d’après Charles, op. cit., p. 357 — pour y être punis. 11, 4. Ainsi en est-il pour les pécheurs, qui sont déjà l’objet d’un châtiment en attendant le jugement qui leur est réservé. ?. 9. Le texte de la Vulgate : in diem judicii reseruare cruciandos pourrait faire illusion ; mais l’original grec témoigne, sans aucun doute possible, que le châtiment est déjà commencé : oïSsv xùpioç… àSîxouç eîç yjizépav xpîaeojç xoXaÇofxévouç -rïjpe’ïv. Nulle part n’est mieux indiquée la distinction et la relation qui existent entre les deux échéances de la justice divine. Et il est clair, bien que le mot n’y soit pas, que ces sanctions provisoires supposent autant que les autres l’intervention d’un jugement.
De toutes façons, l’Apôtre insiste chaque fois sur les conséquences que cette pensée doit avoir pour exciter le chrétien à mener une vie sainte, I Petr., 13-15, à conserver son âme pure, II Petr., iii, 11, 14, à l’exercer èv àyLdoKoiiy.. I Petr., iv, 19.
3° Épîlres de saint Jean.
Il y a peu de place pour
le jugement au milieu des effusions mystiques dont ces épîtres sont remplies. Ainsi que dans le quatrième Évangile, « celui qui croit au Fils de Dieu a le témoignage de Dieu en lui », I Joa., v, 10 ; avoir le Fils c’est avoir la vie et ne pas l’avoir c’est n’avoir pas la vie, Ibid., 12. Le péché est donc déjà par lui-même une source de ténèbres et de mort. I Joa., 11, 9-11 ; iii, 1415. Cependant l’Apôtre sait aussi qu’il appelle une sanction future, qui se traduira par la confusion du pécheur èv t^ roxpouata aÙToîi, 11, 28, que la filiation divine des justes, ébauchée dès maintenant, doit avoir alors son épanouissement, iii, 2, et nos bonnes œuvres leur « pleine récompense ». II Joa., 8. La multiplication des « antéchrists » lui donne même à penser que « la dernière heure » est là. 11, 18. Mais le grand fruit de la révélation du divin amour est précisément de nous donner « confiance pour le jour du jugement, » iv, 17 ; car c’est alors surtout que s’exercera pour nous auprès de Dieu la médiation du Christ. 11, 1. Sans y être prépondérante, l’eschatologie commune est au terme du mysticisme de saint Jean.
4° Épître de saint Ju.dc. — Au contraire, cette petite