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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 9.1.djvu/371

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LIEUX TIIÉOLOGIQUES. ÉLABORATION PRÉALABLE


se munit d’abord d’une définition du concile, qui en exclut la multitude et réserve à ceux-là seuls qui ont juridiction, évoques et prêtres, le droit d’en faire partie. De lotis, t. V, c. h. Il distingue ensuite, d’après le droit et l’histoire, différents genres 4e conciles : conciles généraux, conciles provinciaux, synodes diocésains. L’histoire vient ajouter d’autres divisions à cette première nomenclature. Certains conciles ont été convoqués par l’autorité du pontife romain, d’autres non ; ou encore confirmés ou non par la même autorité. Certains conciles ainsi convoqués n’ont pas été confirmés par clic. D’autres qui n’avaient pas été convoqués ont été ensuite confirmés par le pape.

Pour permettre au théologien de se guider à travers ce dédale et d’utiliser les décisions des conciles, Cano édicté les règles suivantes : Le concile général qui n’est ni convoqué ni confirmé par le pontife romain peut errer en matière de foi. — Le concile général simplement rassemblé par l’ordre du pontife romain peut errer dans la foi. — Le concile général, simplement confirmé par le pontife romain, fait foi en ce qui concerne les dogmes catholiques. — Le concile provincial non confirmé par le souverain pontife peut errer dans la foi. — Confirmé par le pape, au contraire, il ne peut errer dans la foi. Des conciles provinciaux, encore que l’autorité du pape leur fasse défaut, on peut tirer un argument probable. Les simples synodes diocésains, si leurs décrets concernant la foi sont confirmés par le Pontife romain, fournissent un argument certain en faveur de la vérité. Par lui-même, le synode diocésain, dans les jugements en matière d’hérésie, fait foi d’une manière non certaine mais probable. — Le mot probable est pris ici au sens ancien qui emportelaprobabiliorité. Cf. A. Gardeil, La certitude probable, introduction, p. 6.

Toutes ces règles sont illustrées par des exemples historiques, qui, en les concrétisant, déterminent dans le détail la valeur, ou l’absence de valeur dogmatique, de tels et tels conciles, toujours en vue de l’usage théologique, l’unique but.

Mais les principes que l’on vient de lire n'épuisent pas le sujet. Certaines questions plus délicates, et cependant de la plus haute importance, se posent, qui mettent aux prises, pour l’usage des lieux, les théologiens eux-mêmes, nodi quibus interdum homines etiam docti illigari soient. Et Cano, avec une érudition, une souplesse et un discernement admirables de dirimer, en son c. v, ces questions litigieuses : — Q. 1. Cano tient, contre Cajetan et Torquemada, que le concile, présidé par les légats du pape, possède une autorité décisive, sans attendre la confirmation du pape, car il est concile vraiment général, et ne peut pas plus errer dans la foi que l'Église universelle ; car il possède tout ce qu’il faut pour être le sujet normal de l’inspiration du Saint-Esprit et pouvoir dire : Visum est Spiritui sancto et nobis. — Q. 2. Si les Pères des Conciles sont des conseillers ou de véritables juges ? Cano établit la seconde partie de l’alternative. — Q. 3. Distinction entre l’inspiration de l'Écriture sainte qui procède immédiatement de l’Esprit saint, et s'étend jusqu'à tous les détails, fn minimis rébus, et l’assistance des Conciles qui sanctionne le résultat de délibérations conduites humano modo, et n’est donnée que pour les choses nécessaires au salut. Incidemment, est résolue la manière dont les conclusions théologiques appartiennent à ces choses nécessaires, question reprise plus loin, § Ad postremum. — Q. 4. Si l’Esprit saint n’assiste pas les Conciles in minimis, comment discerner les décrets certains au point de vue de la foi ? Cano répond : a) II y a en effet des Décrétales qui ne sont pas décrets de foi, et en particulier cette partie de la Clémenline : De.Summa Trinitate, où l’opinion touchant l’infusion de l’habitus de la grâce et des vertus est choisie comme plus probable par le concile de Vienne,

cf. Denzinger-Bannwart, Enchiridion, n. 483. — b) Le grand signe de la certitude c’est lorsque les conciles s’adressent à l'Église universelle. — c) Il est d’autres notes : la note d’hérésie infligée à l’opinion contraire, l’anathème fulminé, l’excommunication ipso jure, prononcée, l’obligation faite aux fidèles de tenir pour dogme telle sentence, etc. — d) Tout ce qui intervient dans les conciles, comme explication, réponse à des objections, obiter dictum, comme les mots, corporalium etincorporalium dans le chapitre Firmiter, etc., n’est pas de foi, quoiqu’il soit inconsidéré et téméraire de le nier. — Q. 5. Si dans les questions de moribus les conciles peuvent errer ? Cano englobe dans sa réponse la justification de l’inerrance, en matière de mœurs, de l'Église entière, conciles et papes. Ecclesiæ vero auctoritatem nuncappelloquæ synodorum etiam generalium ac summi pontificis est. Trois conclusions, qui sont autant de préceptes pour le discernement des lieux, régissant les mœurs : a) L'Église ne peut errer dans la doctrine des mœurs nécessaires au salut. — b) L'Église, édictant pour tout le peuple desloisen matière grave et qui ont beaucoup d’importance pour la formation des mœurs chrétiennes, ne peut rien commander de contraire à l'Évangile ou à la raison naturelle. Développements à l’appui très intéressants, restreignant la portée de cette règle. — c) Pour ce qui regarde les mœurs, non de toute l'Église, mais d’hommes privés ou d'Églises particulières, l'Église peut errer, par ignorance, non seulement dans le jugement qu’elle porte sur les faits accomplis, mais dans les lois et préceptes privés. Cette conclusion se fondesur la sentence d’Innocent III, De sent, excom., c. 88, judicium Ecclesiæ nonnunquam opinionemsequitur…propterquodeontigit interdum utqui liç/atus est apud Deum, apud Ecclesiam sil solutus, et qui liber est apud Deum, ecclesiastica sit sententiai nnodatus. Avec Cano restreignons aussitôt la partie de cette conclusion. Il ne s’agit pas de révoquer en doute l’autorité de ces décrets, mais de leur donner la note qui leur convient. L’erreur possible est un cas d’espèce, relativement rare, et ne peut être supposée sans des présomptions graves. Elle est possible, voilà tout ce que l’on peut dire, et c’est assez pour caractériser le genre d’autorité de l'Église en ces matières particulières. Ibid.

Cano excepte de cette possibilité d’erreur les décrets de canonisation des Saints, déclarant avec saint Thomas que l’on doit croire à une Proidence spéciale qui empêche l'Église de se tromper sur les témoignages par lesquels, ces décrets sont conditionnés. Néanmoins, il ne regarde pas l’opinion de ceux qui nient la sainteté de tel saint canonisé, comme hérétique, mais comme téméraire, imprudente, irréligieuse. Cf. saint Thomas. Quodlibet. ix, a. 16. — Il est moins strict en ce qui concerne les décrets d’approbation des ordres religieux, surtout modernes. Il faut dire qu’un certain nombre des motifs qu’il donne à l’appui de cette réserve sont empruntés à l'Église romaine elle-même et que, comme l’avance Serry, dans son Prologus galeatus aux lieux théologiques de Cano, le refus d’infaillibilité ne porte pas sur ce qui regarde la substance même des ordres religieux, c’est-à-dire la perfection chrétienne et ses moyens essentiels, où tous les théologiens admettent Ecclesiam falli nesciam, mais sur les circonstances de leur institution, la trop grande multitude des congrégations religieuses, leur nécessité, et certains détails. Voici le prologue de Serry, c. xi, cf., c. x. De vellicato nominc : S. J.

5° Cinquième lieu théologique : L’autorité de l'Église romaine. — Pour Cano. l’infaillibilité du pape en matière de foi et de mœurs ne fait pas de doute, mais n'étant pas encore définie, même par le concile de Florence, et étant contestée par des hommes doctes et pieux à l'époque où il écrivait propter viros quosdam