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LITURGIE. ORIGINALITÉ DE LA LITURGIE CHRETIENNE


reusement exacte. La liturgie doit venir tout de suite après l’Écriture, et avant les Pères, car son témoignage, qu’on le considère au point de vue de l’antiquité, de l’universalité, de la dignité, l’emporte sur tous les autres. Ce témoignage n’aura évidemment pas toujours le même poids. Toutes les liturgies n’ont pas la même valeur. Il faut distinguer entre ce que l’on pourrait appeler la liturgie universelle ou liturgie essentielle (les pratiques et les formules qui se retrouvent substantiellement dans toutes les liturgies) et les liturgies locales qui comportent des différences accidentelles. La liturgie romaine et les liturgies approuvées par Rome ont aussi une valeur toute spéciale, et de même les liturgies qui, durant de longs siècles, ont été celles d’églises orthodoxes. Nous reviendrons plus en détail sur ces questions dans les § IV, V, VIII.

Les Principia theologiæ liturgicæ de Gerbert, Saint-Biaise, 17511, font partie d’une théologie générale, Principia theologiæ exegelicw, Principia theologiæ mysticæ, Principia theologiæ canonicæ, etc., qui est tombée dans un oubli mérité car elle est d’un caractère superficiel et ne contient aucune vue originale. Ses Principia theologiæ liturgicæ ne font pas exception. Ce n’est pas une théologie liturgique, mais plutôt un simple manuel de liturgie. La section la plus développée est celle sur le culte des saints, des images et des reliques, dirigée contre les protestants. Ce livre est composé d’une série de propositions appuyées sur des textes anciens (Pères ou conciles). C’est la partie intéressante et utile de cette œuvre.

Grég. Kœhler a composé un ouvrage, Principia theologiæ liturgicæ ex selectissimis auctoribus, in-12, Mayence, 1788, dont le titre est décevant aussi, car c’est comme celui de Gerbert une sorte de manuel de liturgie d’un caractère assez sommaire et où la théologie liturgique ne tient que bien peu de place. La dissertation de Ant. Zaccaria, De usu Ubrortun liturgicorum in rébus theologicis, édité dans sa Bibliolheca ritualis, Rome, 1776-1781, et réédité dans Migne, Theologiæ cursus complet us, Paris, 1838, t. v, p. 207.’.10. répond beaucoup mieux à son titre et, sans être un livre définitif sur le sujet, contient d’utiles renseignements.

Avant eux et d’une façon plus détaillée, un théologien complètement oublié aujourd’hui, François Carrière, avait publié son ouvrage : Fidei catholicæ digestum singula ejus dogmala et rit us Ecclesiæ juxta S. S. Palrum et conciliorum doctrinam exacte déclarons, Lyon, 1657, 2 vol., in-fol., où la question liturgique dans ses rapports avec le dogme est savamment traitée. Le t. ii, qui est une sorte de commentaire de la profession de foi de Pie IV, défend contre les protestants les pratiques chrétiennes comme le signe de la croix, l’eau bénite, les rogations, les jeûnes, les fêtes, les hymnes, les heures canoniales, les cérémonies, les sacrements et les sacramentaux, le culte des saints et celui des images, les indulgences. Son livre est devenu rare, mais il mérite d’être étudié.

J.-B. Gêner n’est guère moins oublié que lanière, et c’est

dommage, car il puise largement dans la liturgie pour ses

démonstrations. Dans sa Theologia dogmattco-scholastica… locrai anllquitatii monumentls (lluslrata, 6 vol. in-fol., Rome, I7117, il expose d’abord chacun des dogmes à la manière des théologiens scolastiques, puis il illustre sa

thèse par îles arguments tirés ( re lapidaria, < nUturgtca, < rv nummarla, < re siglllari, etc. Son ouvrage témoigne d’un grand travail : Il devrai ! être mis à profit aujourd’hui par tous ceux qui s’intéressent à la liturgie et pal les théologiens qui croient que l’on pourrait faire un usage pins fréquent

(le la liturgie pour la démonstration du dogme chrétien.

Il tant’lire, d’une façon générale, que les théologiens tu

misiècle et du wiii "ni mieux compris l’Importance

île la liturgie dans les questions t héologiques, comme

ni lei ouvrages d’Allatlus, d’Assémanl, d’Arnauld,

le Martène, di Grancolas, de Trombelll, de Thlers, de

i.amv. de Mabillon, de Zaccaria, et de tant d’autres dont un tro ni "ni la bibliographie ou dans le courant « le eit art Icle

Les théologiens modernes dans leurs traités di s lieux

théologlques ne ton) qu’effleura la question ou la résuma

Il quelque, lignes, i munir Iran/clin, I’imIi. : hi omt, I.Mlllirei lit. pouf n’en cltei que quelques lins. Seuls le IV l’erroné il mieux enei.re I. r lier t hier, dans son 7 rurtn

iheologtt fs, 1900, p, L"i 140, nous paraissent ▼oh

donné à la liturgie comme heu théologique l’importance qu lui revient. Le P. Perrone, dans ses Præleciiones theologica’, éd. post secundam romanam diligenter emendata, édit. Migne, Paris, 1842, t. ii, col. 1238-1241, nous dit en des termes équivalents à ceux de Bossuet : Maximi faciendam esse aueioritatem sacræ liturgiæ eamque habendam uti tesiem omni exceptione majorem traditionis et Ecclesiæ fidei, is solum inficias iuerit, qui non adverterit in illa Ecclesiarum omnium exhiberi vocem ac lestimonium episcoporum, presbyterorum et plebis ipsius suffragia, leges, ritus, effaia, dogmata, col. 1238. Il montre ensuite que la plupart des dogmes chrétiens sont proclamés dans la liturgie.

Parmi les théologiens modernes qui se sont aussi occupés de la question liturgique dans ses rapports axec le dogme, nous citerons encore une thèse assez originale, qui devrait être reprise et complétée, de P. Schoulza, dex-ant l’Université de Lille, Thèses Insulenses, n. 14 : Liturgia catholica catholicæ fidei magistra, in-8° de vii-184 p., Lille, 1901. Elle n’est pas dans le commerce. Plus récemment, Menghini et Callevært apportent une utile contribution, le premier dans Elementa juris liiurgici seu prolegomena in sacrant liturgiam, Rome, 1907 ; le second, dans ses Liturgica’institut iones. Tractatus primus de S. Liturgia universim, Bruges, 1919.

En dehors de ces théologiens qui ont traité directement de la question liturgique, il en est d’autres qui ont compris la portée de l’argument liturgique et ont puisé largement à ces sources pour l’exposition de leurs thèses, entre autres, le cardinal Van Rossum, Mgr Batiffol, les Pères de La Taille, d’Herbigny, Lebreton, d’Alès, Galtier, dont les ouvrages seront cités aussi au cours de cet article.

II. Originalité de la liturgie chrétienne ; emprunts au judaïsme, au paganisme. — 1° Liturgie chrétienne et culte juif. — Une première question se présente. Dans quelle mesure la liturgie chrétienne est-elle originale ? Elle a fait des emprunts à la religion de Moïse, au service de la synagogue et même au service du temple. Cela est indiscutable. Mgr Duchesne a dit : « La liturgie chrétienne procède, pour une très large part, de la liturgie juive et n’en est même que la continuation. » Origines du culte chrétien, p. 46. Il n’existe pas, je crois, de travail d’ensemble pour fixer exactement le nombre et la nature de ces emprunts, mais l’assertion de Mgr Duchesne demeure vraie dans une large mesure. Usage de l’encens, des cierges, lustrations, acclamations (Amen, Alléluia, Hosanna), forme des prières (collectes, anaphores, préfaces, etc.). tout cela était en usage dans l’Ancien Testament. Les deux fêtes capitales, la Pàque et la Pentecôte, sont aussi devenues un des pivots du calendrier chrétien. Cf. nos Origines liturgiques, Paris, 1906, p. 48 sq.

Mais il y a un fait beaucoup plus considérable. Tous les livres de l’Ancien Testament sont entrés d’un coup dans la bibliothèque de la liturgie chrétienne. Tous sont lus durant le service, et les psaumes et les cantiques de l’Ancien Testament constituent l’essence même de la prière chrétienne. Si bien qu’à l’origine une Bible eût. pu suffire à peu près, sans le secours d’aucun autre livre, pour le service divin. Oui ne voit l’importance d’un pareil fait ? C’est toute la théologie de l’Ancien Testament qui devient du même coup la base de la liturgie chrétienne.

De ce côté rien d’anormal ni d’inquiétant pour le théologien. Il sait que l’Église a succédé à la Syna gogue, qu’elle est l’héritière « le tous ses livres ; que le peuple juif, iejeté pour son infidélité, a été retnplaci par le peuple chrétien qui est devenu le peuple de I lieu. L’Église ne cesse île le répéter dans ms prières. Plebs tua, popultu tiius. familia tua, t/rns tua, cet termes qui font partie de lapins ancienne terminologie liturgique, on ! poux bul d’insister sur ce fait de la substitution de i.i rnce chrétienne a If race Juive, Le baptême fait

du baptise un fils d’Abraham, plus que cela, un enfanl de Dieu. CC théine ie ient 10US bien des formes dans la liturgie antique et le choix de cei laines leituies n’a pas d’autre origine.

Bien loin d’embarrasseï If théologien, ce fait, qui