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MAH0MÊT18ME, SOUNNISME, DOCTEURS PRINCIPA1

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Nous uo discuterons pas cette question. Nons nous contenterons de remarquer que, dans les crises douloureuses de itouto ou plus exactement d’Inquiétude dogmatique (car il n’a Jamais douté de sa fol), U a dû Itre ballotté entre bien des opinions contraires, s'être arrête un moment a des solutions qu’il a rejetées ensuite, en un mot être victime lui-même des contradictions qu’il a si éloquemment dénoncées dans les raisonnements humains. Il avoue lui-même qu’il n’a pas trouvé la vérité du premier coup : il a donc passe par des périodes d’erreur et de palinodies. Ce n’est pas manque de sincérité, e’est faiblesse humaine. L’effort n’en est pas moins admirable, et cette magnifique aspiration vers Dieu <l’un puissant esprit est digne d’inspirer le respeet. N’y a t-il pas, d’ailleurs. une erite profonde dans eette conclusion que, pour atteindre Dieu.il faut renoncer au monde, et, pour recevoir sa lumière, se mettre en état île réceptivité? I. islamisme, jusqu'à Ghazall, semblait une religion en quelque sorte passive et indolente, il a seeoue son inertie, il l’a rapprochée de son Dieu, qui semblait s'éloigner de plus en plus dans l’abstraction. Nous verrons que tel fut le rôle du soufisme, une fois qu’il eut ete introduit par Ghazall au cœur même de l’islam, alors que, jusqu'à lui. il avait veeu un peu en marge et éveille ches les doeteurs de la loi plus de méfiance que de sympathies.

Après. l’argument de l’islam. le Bounnisme ne subit pour ainsi dire plus de fluctuations. Le soufisme qu’il a admis en son sein, le peintre progressivement, tns le modifier, l’imprègne et le colore profondément. D’autre part, les adversaires frappes par Ghazàli, disparaissent peu a peu. lui laissant le eliamp libre. Avec l’avènement de la dynastie ottomane, ferme appui de l’orthodoxie, il étend de plus en plus son rayon d’action.

La constitution du I adith selon le sounnisme.


Avant de terminer l’histoire du sounnisme, il importe de dire quelques mots sur la constitution du I adith tel que l’ont conçu les sounnites. L’importance qu’ils lui ont accordée dans leur doctrine les a amenés à l’organiser, à le systématiser, a lui donner le plus possible son caractère indispensable d’infaillibilité. C’est une œuvre capitale à laquelle beaucoup se sont attachés et qui n’a été parachevée qu’assez tard.

as avons dit, col. 1581, ce qu'était le I adith, comment il s'était formé peu a peu. d’abord oralement et, semble-t-il. un peu au hasard, puis vers la fin du ie siècle de l’hégire avait été écrit, compilé, puis . par matières. Mai-, dès qu’il devint une arme aux mains des théologiens dans les controverses qui èrent vers la même époque, la bonne foi qu’on peut présumer ehez les premiers disciples et même chez les premiers compilateurs, dut céder vite à la tentation de créer des arguments en attribuant au Prophète les propos conformes aux opinions qu’on soutenait. Par voie de conséquence, on suspecta ou on nia tout hadith allégué par l’adversaire, et. devant la multitude extraordinaire des traditions éeloses de toute part, il fallut bien faire une discrimination. De là la critique du I adith, science toute musulmane et particulièrement nécessaire au sounnisme qui y voit une base infaillible. Nous avons déjà expliqué pourquoi cette critique ne porte ni sur le texte puisque, venant du Prophète, il participe à son infaillibilité, ni sur l’autorité de celui qui le rapporte, le râwi, puisqu’en sa qualité de Compagnon il participe à l’infaillibilité de Vidjma, mais sur la transmission a partir du ràivi.

Dans les premiers recueils que nous possédons, comme le Mouwat d de Mâlik, ou le Djâmt de son disciple Ibn Wahb, cette question paraît n’avoir guère préoccupé leurs auteurs. Nous avons déjà

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remarque que ehez Màlik. la tradition ne remonte pas toujours au prophète, ni même a un de ses Coin pagnons, en sorte que la transmission ne vaut iei que pu l’autorité exeepl ionnelle de Màlik Mais

après lui, les musulmans deviennent plus sévères et, sous l’Influence d’ach Chafl’t, des règles rigoureuses sont Imposées aux auteurs de recueil de i adîths.

on reconnut trois sortes de hadlihs, le parfait.

. le bon et le faible, l.e premier est celui donl i’isndd, OU chaîne de ti aditionnistes, est continu et

ne renferme que des Individus probes, d’information sûre. Le premier ouvrage, consacré uniquement au

hnl.th parfait, est le recueil de Koukhari, intitule

précisément as $ahth. Ensuite vient Mouslim qui

adopta le même titre. Les ouvrages de ees deux auteurs sont considérés comme les plus parfaits de tous les livres après le Coran. Le plus parfait est. d’après l’opinion le plus répandue, celui de Houkhari. Ces deux maîtres n’ont pas épuisé la matière du I adith parfait et n’y ont jamais prétendu. En y ajoutant trois (ou quatre) autres recueils canoniques, Intitulés les sounnas (sounan) qui sont d’Aboû Daoûd, at Tarmîdhi, N’asàï (et Aboù.Màdja). on a, sauf une très faible quantité, la somme des parfaits.

Il y en a dans Houkhari 7275 ou 4000, si on défalque ceux qui y sont répètes, autant environ dans Mouslim. Le reste se trouve dans les autres recueils complémentaires (canoniques ou non). Nous allons donner quelques indications sommaires à ce sujet.

Mou ! ammad Ibn Isma’il al Houkhari (194-250 = 810 870) naquit à Houkharà, dune famille persane. Il lit de nombreux voyages pour recueillir des traditions, plus de G00 000 à ce qu’il rapporte. Son ouvrage dont le titre complet est al Djâmi' as Sahih est composé suivant les matières du droit et est remarquable par les introductions mises en tête de chaque livre et de chaque chapitre, où il expose la doctrine juridique, dont les I adîths seront l’illustration. Aussi cntre-t-il souvent dans la discussion des diverses thèses, et l’ensemble de ces rubriques formc-t-il un véritable compendium de droit musulman.

Mouslim ibn al Hadjdjâdj (202-261=817-875) était plus jeune que Houkhari de quelques années seulement. Il le connut, se lia avec lui et se brouilla à son sujet avec son maître qui prétendait que la prononciation du Coran avait le même caractère éternel que le texte et n'était pas créée. Sou livre, al Mousnad a- %ahth est conçu au même point de vue que celui de son contemporain, mais sur un autre plan. Pas de sommaire aux rubriques, mais une introduction à l’ouvrage, où il expose son but qui est de présenter le hadith dans toute sa pureté, dégagé de toutes les erreurs qu’y avaient accumulées l’ignorance et la mauvaise foi. Mais il ne fait qu’esquisser la critique proprement dite du hadith.

Aboù DâOÛd Soulcïmàn ibn al Ach’ath (202-275 = 817-889) tient la troisième place et son livre de sounnas a un moment balancé la vogue des deux grands recueils précédents, mais fut délaissé peu à peu. Il a présenté sa théorie du 1 adith dans un traité spécial ; elle est encore incomplète.

Mou ! ammed ibn’Isà at Tarmîdhi († 279) donne à son livre le titre de : al Djâmi' as Sahih et inaugure une nouvelle méthode. Il fait suivre chaque hadith d’une appréciation sur sa valeur intrinsèque et son utilisation juridique ; enfin, il donne à la fin sa propre théorie encore un peu rudimentaire.

NOUS ne ferons que mentionner les deux autres : V mad ibn 'Ali an Nasal (215-302 = 830-914) et Mou ! ammad ibn Yazid ibn Màdja<20'.)-273 = 824-886), dont les sounan n’offrent rien de bien remarquable, surtout celle du dernier qui n’est pas classée par tous les auteurs dans les livres canoniques.