Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 9.2.djvu/194

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mlère des créatures, est elle-même une créature,

[tU par muvolonté libre de Dieu, et non point engendrée de si substance par la nécessité île m*" être.

Mais ee sentiment et ranle (nus les fondements de la morale en étant à l’ordre et au lois éternelles qui

en dépendrai leur Immutabilité, et il renverse tout

I 'édifice de la religion eliretienne. > Rec he r c h e, X 1 1 1' éclaircissement. Rien ne peut mieux mettre en lumière la divinité du Verbe que la nature divine des idées elles-mêmes qu’il porte en lui. - Quant au Saint-Esprit, aux yeux de Malebranche comme au regard de toute la tradition, il est en Dieu ce qui

représente l’Amour Infini. Ete est lui qui répand dans les eCBUn eet amour surnaturel dont il est le

principe.

-. Anthropologie. - - Pour être bien comprise, la théologie des trois états de l’homme dans Malehranche demande a être rapportée à son Anthropologie particulière.

Or. eette anthropologie est résumée par lui-même

dans la formule décisive que voici : i L’homme est un composé de deux substances, esprit et corps dont

les modalités sont réciproques en conséquence des

générales qui sont cause de l’union de ces deux natures.t Bhlrtliens sur la métaphysique, XII. l>ans eette définition, il v a un élément qui restera toujours invariable parée qu’il sert de fondement a la reeiproeite : c’esl la loi même du parallélisme. Mais il a un autre élément qui peut varier considérablement. Et eette variation peut aller jusqu'à l’interversion complète du rapport des deux termes en présence, en sorte que, des deux conditions possibles pour l’homme, la seconde prenne la place de la première. En effet, l'élément variable dont nous parlons, c’est la relation de l’esprit au corps. Normalement, l’esprit doit avoir la prédominance. Mais la prévalence peut être transférée au corps Ainsi les deux substances dont nous sommes composés peuvent se disputer l’empire du tout qu’elles constituent. Et la loi de la réciprocité jouera en faveur de celle des deux qui aura pris le dessus sur l’autre.

Dans l'état de justice originelle, c’est l’Ame qui tient les rênes du gouvernement. LUe est la maîtresse de tous les mouvements du composé humain. Ht Malebranche va jusqu'à dire qu’il est pratiquement inconcevable que Dieu eût pu primitivement soustraire l'élément matériel a la parfaite domination de l'élément spirituel. Dans cette première situation où les [a cteu rs sont disposés l’un par rapport à l’autre selon une hiérarchie conforme à l’ordre, l’homme n'éprouvait aucune difficulté a agir en toutes circonstances selon sa nature et sa destinée. Il suffisait pour cela qu’il reçût une grâce de lumière. En effet, l’illumi n de l’esprit entraînait l’adhésion spontanée au bien d’une volonté gagnée d’avance à Dieu. Cette de pure lumière est ce que Malebranche appelle la grâce du Créateur. Il la distingue avec soin de la de sentiment ou grâce du Rédempteur, laquelle, selon lui. n’a rien a voir ici. Il prétend que, en matière de grâce, saint Augustin a lui-même distingué entre la lumière et le sentiment. Et il cite à l’appui de sa thèse un texte du grand Docteur ou apparaît, en effet, très nettement la distinction en question. Mais il est fort douteux que saint Augustin l’ait entendue dans le sens que lui donne Malebranche. Le texte invoqué ne semble pas suggérer l’idée de deux_ grâces distinctes, ni surtout séparables : il paraît simplement

r le discernement de deux éléments indivisibles en fait d’une seule et même grâce. Toujours est-il que Malebranche met, d’un cote, la grâce de lumière sous le nom de grâce du Créateur, et. de l’autre, la

de sentiment sous le nom de grâce du Rédempteur. Il a mémo, sur l'état du premier homme, une

formule Inquiétante et suspecte, il dit quelque part que la lumière, dans son origine, n'était que la

nature. Proposition ruineuse, si on la prend a la

lettre. Heureusement, on peut et même on doit

l’interpréter dans un sens satisfaisant, lai effet, un examen attentif de l’ensemble des textes de notre auteur amène a taire la double constatation suivante : m la grvce de lumière vient du Verbe incarne tout comme l’autre : car, au regard de l’oratorien, la grâce d’Adam procède du Christ ; />> la

gr&ce de lumière n’est qualifiée de naturelle que parce que, maintenant encore, les causes occasionnelles qui en procurent la dispensât ion sont ordinairement prises de l’ordre de la nature. D’un mol. la grâce primitive est dite naturelle, non a raison de son essence qui se rapporte à.Icsus-Christ comme cause méritoire, mais à raison de sa dispensation cpii relève du jeu de causes occasionnelles qui sont ici en realite les causes naturelles.

Nous arrivons maintenant à l'état de déchéance. Déterminé par la faute de notre premier père, il a succédé à l'état premier de justice surnaturelle. Nous voici donc aux prises avec le fait du péché originel, Or. ce fait occupe chez Malebranche une place énorme. Il en traite longuement. Il y consacre des pages pro tondes, suggestives, riches de précieuses indications. Pour lui, la condition présente de l’homme révèle un désordre qui serait un scandale s’il était' imputable a Dieu. Il est ime que, seule, la prévarication d’Adam rend compte de ce désordre d’une manière satisfaisante pour la raison.

Il va même trop loin en ce qui regarde l'évidence de la faute qui est au principe de la rupture d'équilibre dont nous sommes les victimes en même temps que les témoins. La désorganisation morale de notre nature lui apparaît dans une lumière si crue que, du moins par endroits, il a l’air d’admettre qu’elle révèle elle-même son origine en accusant l’existence d’un péché spécifique de l’humanité.

Malebranche est plus exact quand, se corrigeant opportunément lui-même, il écrit que « nous savons par la foi que le péché a renversé l’ordre de la nature ». Sur un autre point, il est peut-être moins facile de l’excuser. Il a proposé, en effet, une théorie de la transmission du péché originel qui attache une importance excessive à un élément d’ordre purement physiologique. Il voit dans les traces du cerveau de la mère qui s’impriment dans le cerveau de l’enfant la grande cause de l’hérédité corrompue. Certes la génération charnelle joue un r<>le dans la transmission du péché spécifique. C’est inévitable et c’est certain..Mais on ne peut pas ramener la triste hérédité dont nous subissons la loi à une tare purement physique. Les traces du cerveau ne sont pas l’unique principe des dérèglements de l’humanité issue d’A1 dam. Il faut réserver la place d’un facteur spirituel I qui ne peut manquer de jouer un rôle prépondérant dans une histoire si visiblement dépendante de l’ordre religieux. La position prise par Malebranche semble ici suspecte.

Mais l’ensemble de la doctrine qu’il a professée sur le péché d’origine est du plus haut intérêt. Il n’est pas possible, dit-il, que « les esprits aient été soumis aux corps dans la première institution de la nature. (Entendons ici nature au sens défini plus haut. ; Dans la premier état de la création, l’homme exerçait sur son corps un pouvoir discrétionnaire. Mais voici que à l’institution de la nature a succédé la corruption de la nature. Alors tout change de face. L’homme, par son péché, devient l’esclave du démon, la plus méchante des créatures, et dépend du corps, la plus vile des substances. > Et voilà renversé l’ordre normal de la relation hiérarchique entre les deux