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DICTIONNAIRE

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THÉOLOGIE CATHOLIQUE

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MABILLON Jean, bénédictin de la congrégation de Saint-Maur (1632-1707). I. Vie et ouvrages. II. La théologie de Mabillon.

I. Vie et ouvrages — Jean Mabillon naquit le 23 novembre 1632, au village de Saint-Pierremont, dans les Ardennes, d’une famille pauvre. Jean eut pour premier professeur un oncle curé ; il fit ensuite ses études au collège de l’Université de Reims, et, après un court séjour au séminaire où il reçut la tonsure, il entra à l’abbaye bénédictine de Saint-Remy de Reims. Il y fit profession le 6 septembre 1654, âgé de vingt-deux ans à peine. Humble, austère, zélé pour les observances monastiques, il édifiait les novices dont on lui avait confié la direction, quand des maux de tête lui survinrent et l’obligèrent à quitter Saint-Remy. Il passa successivement dans les abbayes de Saint-Nicaise, de Saint-Thierry, de Saint-Basle, de Nogent. Au mois de juillet 1658, il se rendit à Corbie et fut ordonné prêtre a Amiens, le 27 mars 1660. Délivré de ses maux de tête par la protection de saint Adalard, il témoigna sa reconnaissance en composant des hymnes pour l’office du saint, pour l’office de sainte Bathilde, patronne de l’abbaye ; il revisa en même temps les autres offices propres de la maison. Ce fut son modeste début dans la vie littéraire. Voir dom J. Besse, Le premier ouvrage de Mabillon, dans Archives de la France monastique, t. V, Mélanges et Documents, p. 355, 359. En juillet 1663, Mabillon passait à l’abbaye de Saint-Denis. Dans ces divers séjours, ce moine modeste avait donné des preuves d’une grande aptitude pour les travaux d’érudition ; aussi, dès 1661, fut-il donné comme aide à dom Luc d’Achéry, bibliothécaire de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés. Présenter un rapide aperçu des travaux de Mabillon, c’est résumer en même temps toute la vie de cet humble moine, le grand représentant de l’érudition en France au xviie siècle. Quelques-uns de ses traités sont écrits en français, mais la plupart sont rédigés en un latin pur, élégant, correct qui donna lieu de dire que Mabillon écrivait en cette langue comme Monsieur de Meaux en français.

Dès son arrivée, on le chargea de préparer l’édition des œuvres de saint Bernard, commencée à Saint-Denis par dom Claude Chantelou. Celui-ci étant mort, ce fut Mabillon qui donna, sous ce titre : Sancti Bernardi opera omnia, deux éditions, l’une en 2 volumes in-fol., l’autre en 9 vol. in-8o, Paris 1667. En 1690, Mabillon devait présenter de nouveau l’édition revue par ses soins et dédiée au pape Alexandre VIII. La publication comprenait des préfaces, des commentaires et des notes qui, d’après Hauréau, Nouvelle biographie générale, t. xxxii, p. 446, firent ranger le jeune moine au nombre des savants du siècle.

En même temps dom Luc d’Achéry chargeait son jeune auxiliaire de coordonner et de mettre en œuvre les documents recueillis sur les Saints de l’Ordre bénédictin ; dès 1668, sous le nom des deux religieux, paraissait le t. i des Acta Sanctorum ordinis sancti Benedicti per sæculorum classes distributa, in-fol., Paris. Les préfaces, notes et commentaires étaient l’œuvre de dom Mabillon : véridique avant tout, il y restituait à leurs ordres respectifs des personnages qui n’avaient pu appartenir à la famille bénédictine. Ce procédé ne fut pas compris ; certains frères du jeune religieux, animés d’un faux zèle, l’accusèrent presque d’hérésie. Mabillon se défendit avec douceur et sérénité contre les accusations des PP. Mège et Bastide, et ceci nous a valu un long Mémoire justificatif où se trouvent exposés de main de maître les principes de la critique historique qui ont prévalu depuis lors. Voir à ce sujet : L. Delisle, Dom Jean Mabillon : sa probité d’historien, dans Archives de la France monastique, t. V, p. 93 sq. ; dom P. Denis, Dom Mabillon et sa méthode historique : Mémoire justificatif sur son édition des Acta Sanctorum O. S. B., in-8o, Paris, 1910, 64 p., extrait de la Revue Mabillon, t. VI, p. 1-64 ; A. Dantier, Correspondances bénédictines : Archives des missions scientifiques, t. VI, p. 358. Les autres volumes des Acta Sanctorum O. S. B. se succéderont jusqu’en 1701, de façon à former 9 volumes in-fol., allant du vie au xiie siècle ; dans ses belles préfaces, Mabillon fera entrer d’une manière naturelle et agréable les principaux points de l’histoire de cette période ; il y traitera même de temps en temps, avec précision et netteté, les dogmes de la religion, les matières de la discipline, soit ecclésiastique, soit monastique.

Vers 1671, paraissent les Petri abbatis Cellensis opera omnia, studio uniuse Sancti Mauri congregatione monachi, in-4o, Paris. « On s’étonne, écrit Léo