Page:Alfred de Bougy - Le Tour du Léman.djvu/152

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c’est ce qui m’arriva, mais je m’y attendais, je m’étais résigné d’avance au potage d’herbes et de pommes de terre et à l’omelette brûlée, car je n’ai pas entrepris un voyage gastronomique autour du Léman.

L’hôtellier, qui m’a reçu dans une salle enfumée, semblable aux intérieurs flamands de Téniers, est un homme corpulent, à face débonnaire, sa grosse chemise de toile sort de ses chausses tout autour de son ventre arrondi, il a pour coiffure le classique bonnet de coton, il est en manches de chemise.

Au moment de mon entrée trois manouvriers étaient attablés autour d’une soupière de la grosseur d’un baquet, une servante plongeait ses bras dans un pétrin, une fumée épaisse remplissait la maison et des régiments de mouches bourdonnaient aux poutres noires du plafond, une lampe, perchée au sommet d’un de ces chandeliers très élevés en forme de colonne dont les villageois de ce pays font usage, rendait les ténèbres plus visibles.

Quand j’eus soupé je demandai une chambre.

— Monsieur, me dit l’aubergiste, ça ne vous ferait-il rien de ne pas coucher seul ?

— Comment ?

— Il y a une dame...

— À la bonne heure !

— Une dame de Genève qui...