Page:Alfred de Bougy - Le Tour du Léman.djvu/346

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voulez conserver un repos qui ressemble à la léthargie, à la paralysie : vous n’êtes pas précisément morts, mais vous ne vivez point.

Cet état vous convient... grand bien vous fasse !

Quand le bon roi Charles-Albert a traversé les monts et visite sa fidèle Savoie, ses loyaux sujets qui habitent ce côté des Alpes, il rencontre partout des cavalcades d’honneur, des harangues, des arcs de triomphe faits de feuillage et de fleurs, des fêtes, — non pas seulement officielles, — des compliments sincères, des acclamations unanimes d’amour, de respect, de joie, de reconnaissance !...

Ô bonhomie savoisienne ! allobrogique simplicité !

La Savoie me paraît d’autant plus malheureuse qu’elle a perdu à peu près tout sentiment de son malheur, de sa maladie passée à l’état chronique ; d’autant plus à plaindre qu’elle ne se plaint guère.

Elle récolte les fruits de l’alliance étroite du pouvoir et de l’Église, ou, pour mieux dire, de leur complète fusion.

À peu de chose près, le fond du régime sarde, c’est la féodalité :

Prépondérance du clergé, hauts emplois dévolus à une caste ; édits, décrets, lettres-patentes du monarque qui ont force de loi ; peu de petites propriétés, beaucoup de domaines seigneuriaux trop vastes pour être cultivés