Page:Alfred de Vigny - Cinq-Mars, Lévy, 1863.djvu/426

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ment prise la somme de 60,000 livres applicables à œuvres pies. »

Après la prononciation de l’arrêt, M. de Thou dit à haute voix :

— Dieu soit béni ! Dieu soit loué !

— La mort ne m’a jamais fait peur, dit froidement Cinq-Mars.

Ce fut alors que, suivant les formes, M. de Ceton, le lieutenant des Gardes écossaises, vieillard de soixante-six ans, déclara avec émotion qu’il remettait les prisonniers entre les mains du sieur Thomé, prévôt des marchands du Lyonnais, prit congé d’eux, et ensuite tous les gardes-du-corps, silencieux et les larmes aux yeux.

— Ne pleurez point, leur disait Cinq-Mars, les larmes sont inutiles ; mais plutôt priez Dieu pour nous, et assurez-vous que je ne crains pas la mort.

Il leur serrait la main, et de Thou les embrassait. Après quoi ces gentilshommes sortirent les yeux humides de larmes et se couvrant le visage de leurs manteaux.

— Les cruels ! dit l’abbé Quillet, pour trouver des armes contre eux, il leur a fallu fouiller dans l’arsenal des tyrans. Pourquoi me laisser entrer en ce moment ?…

— Comme confesseur, monsieur, dit à voix basse un commissaire ; car, depuis deux mois, aucun étranger n’a eu permission d’entrer ici…





Dès que les grandes portes furent refermées et les portières abaissées :

— Sur la terrasse, au nom du ciel ! s’écria encore Grandchamp. Et il y entraîna son maître et de Thou. Le vieux gouverneur les suivit en boitant.