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des héritages déjà mangés et songeait à l’immortalité de l’âme. Ce jour-là, il n’avait pas le temps. Il fourra dans ses poches des poignées de louis gagnés la veille, puis ayant donné l’ordre d’atteler, se fit conduire chez Bignon, où l’attendait son ami Taïko. Tous deux dinèrent tranquillement, sans appétit, mangeant peu, buvant ferme, le sang brûlé par l’existence fiévreuse des derniers jours, causant du cercle et de leurs projets pour la soirée.

— Je vais ce soir à l’Opéra, dit le prince.

— À l’Opéra ? Qu’y comptez-vous faire, demanda Valterre.

— Pas grand’chose. Je retrouverai Cora, probablement.

— Qui ça, Cora ? répliqua le vicomte qui avait tout à fait oublié les aventures du Japonais.

— Parbleu ! cette petite femme qui chantait dans le Ban des Belles-Mères :

Voulez-vous voir mon grand ressort ?

Vous savez bien.

— Cette histoire-là dure encore ?

— Oui.

— Vous l’aimez donc, cette petite ?

— Ma foi non ! C’est elle qui s’est invitée.

Taïko eut une moue légèrement dédaigneuse et alluma un cigare.

— Alors c’est elle qui vous aime, conclut logiquement Valterre.