Page:Allais - À l’œil.djvu/158

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— À quoi dois-je attribuer cette erreur ? Si je croyais aux sorts, je dirais qu’on m’en a jeté un. Ah ! ces aiguilles, surtout la grande !

Et, depuis un an, ce pauvre vieux travaille à sa pendule, car l’amateur ne veut prendre livraison de l’œuvre et la payer, que lorsque les aiguilles seront exactement comme dans l’original.

Le désespoir du bonhomme était si profond, que je compris l’inutilité absolue de toute explication.

Comme un homme qui compatit à son malheur, je lui serrai la main, et le quittai dans le petit cabaret où nous étions.

Au bout d’une vingtaine de pas, je m’aperçus que j’avais oublié mon parapluie. Je revins.

Mon vieux, attablé devant un nouveau curaçao, était en proie à un accès d’hilarité si vive qu’il ne me vit pas entrer. Littéralement, il se tordait de rire.

Tout penaud, je m’éloignai en murmurant :

— Vieux fumiste, va !