Page:Allais - À l’œil.djvu/50

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Mme  Martin comptait plus de trente printemps, mais la quarantaine n’était pas encore près de sonner pour elle.

Jolie, élégante et frivole, elle semblait à tous la fille de son mari et la sœur aînée de son fils.

Ce dernier, gentil garçon de dix-huit ans, abominablement gâté par sa maman, mauvais sujet, empruntait déjà des sommes relativement considérables aux amis de son père, aux fournisseurs et même, une fois, au concierge.

Le cœur d’une mère contient des tombereaux d’indulgence. Mme  Martin payait tout, à l’insu de son mari.

Un jour, le jeune Martin commit une frasque si scandaleuse qu’on ne put la cacher au père.

Le père enfourcha ses grands coursiers, fulmina et décida que Gaston s’engagerait immédiatement pour cinq ans.

Les yeux d’une mère sont d’éternels et spacieux réservoirs à larmes. Mme  Martin en versa des torrents.

Mais en vain : M. Martin fut de granit.

La seule concession qu’il fit à la mère éplorée, fut de la laisser accompagner l’enfant jusqu’à la porte de la caserne.

Au moment de la séparation, le sergent de planton, touché de ses sanglots, conseilla à