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LES ARBRES QUI ONT PEUR DES MOUTONS

Hein, mon vieux Shakespeare, les voilà bien les forêts qui marchent, les voilà bien !

Sans nous arrêter à la légitime stupeur du flâneur rencontrant la forêt de Compiègne dans la rue de Rivoli, passons à une troisième communication qui ne fut pas sans me bouleverser :

« Il y a des arbres, m’écrit M. le vicomte de Maleyssie, notamment les bouleaux et les chênes, qui éprouvent un trac abominable quand passe, non loin d’eux, un troupeau de moutons. Et cette frayeur se traduit par un retrait immédiat de la sève dans l’arbre, au point qu’il n’est plus possible de détacher l’écorce de l’aubier. »

Un peu, ce me semble, comme lorsque nous éprouvons un sentiment de constriction à la gorge.

Et, à l’appui de son dire, M. le vicomte de Maleyssie m’adressa des documents, dont quelques-uns assez précieux ; entre autres, le numéro d’avril 1833 du Cultivateur.

À la page 210 de ce vieil organe, je trouve le récit suivant dû à la plume du grand-père même de M. de Maleyssie :

« Des ouvriers étaient employés à écorcer des chênes sur l’un des penchants d’un coteau situé entre deux vallées, dans la propriété que j’habite. Le temps était très favorable à ce genre de travail ; aussi avançait-il assez vite, lorsque peu à peu il devint moins aisé. L’écorce ne se souleva plus qu’a-