Page:Allais - En ribouldinguant.djvu/51

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dans ses cheveux et y mourir, très doucement.

Les personnes qui me connaissent un peu n’auront pas grand’peine à s’imaginer que, le lendemain, je manquai le départ de mon steamer.

Elle s’appelait Betzy Campbell, et nous devînmes bientôt les meilleurs amis de la terre.

Je connus son père, sa mère, ses frères, ses sœurs, et, en général, tout ce qui constitue une famille, dans le nord-ouest de l’Angleterre.

Puis, le time ne cessant d’être money, et les nommés business s’obstinant à demeurer business, je dus m’embarquer pour ce malencontreux Canada.

Dire les larmes de Betzy Campbell serait une tâche au-dessus de mes forces.

Jamais, même au pis de mes orgies (durant ces sept mois passés à Québec, je n’ai pas dessaoulé), je n’oubliai les cheveu de ma tant jolie.

Et puis, devant le parti pris idiot des Canadiens contre le topinambour, je me décidai à revenir en Europe.

Une dépêche m’avait précédé ; sur le quai m’attendait all the family Campbell.

Ô Betzy ! Affreuse Betzy !

À son aspect mon visage devint pâle comme celui d’un serpent.

S’était-elle pas avisée, ce petit chameau-là, de faire couper ses cheveux, ses cheveux, entendez-vous, ses cheveux !

Maintenant, elle semblait un joli, mais effronté petit garçon.

— Betzy, lui dis-je après dîner, vous n’êtes plus la Betzy de mes rêves, avec vos cheveux courts (with your short hair).

De grosses larmes s’échappèrent de ses grands yeux d’azur, et je rentrai me coucher au North-Western Hôtel (en face de la statue équestre de Her Majesty Victoria).

Le lendemain, comme j’allais prendre congé de ces braves Campbell, un cri de stupeur rauque s’échappa de ma gorge.

Betzy, Betzy avec ses cheveux innombrables, dorés et plus longs encore qu’antan !

À force d’amour, pendant la nuit, Betzy avait réussi à faire repousser ses cheveux.

Chère, chère, chère petite Betzy.