Page:Allais - Le Boomerang.djvu/77

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bête. (Frappé d’une idée subite.) Mais, j’y pense ! Puisque vous allez toucher toute votre galette en bloc (il fait le geste d’amonceler des tas d’or), qu’est-ce qui vous empêche de la placer en viager, au lieu de vivre bêtement sur le capital ?

Le Pauvre Bougre est pauvre, mais honnête : cette proposition révolte sa délicatesse.

— Je ne sais pas si ça serait bien correct. J’ai droit à cent sous, je n’ai pas droit à six francs.

— Ce scrupule vous fait honneur ; mais, à votre place, je ne le partagerais pas. Cet argent que vous allez toucher, il est à vous. Vous avez bien le droit, nom d’un chien ! d’en faire ce que bon vous semble. Ou alors la propriété n’est qu’un vain mot !

L’argument est, en effet, des plus plausibles.

Le Pauvre Bougre hésite.

— J’y songerai, se gratte-t-il la tête d’une main perplexe.

— Ou bien encore, achetez un café-concert où vous pousseriez la romance en servant des cerises à l’eau-de-vie.