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Page:Allais - Silvérie.djvu/28

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navire anglais chargé des sondages s’appelait le Tuscarora(Regardant Silvérie.) Hé bien ! les sondeurs du Tuscarora — qui doivent être des sondeurs habiles — peuvent tous être mis en présence de la frêle petite âme que voici. Ils pourront déployer jusqu’au bout leurs plus grandes sondes. (Avec une véhémence croissante.) Ils se pencheront sur le bastingage pour aller plus profondément. On leur permettra de s’accrocher par les pieds au bord du navire et de tenir la corde au bout de leurs doigts. Croyez-vous qu’ils atteignent le fond de cette âme mignonne, de cette démesurée candeur ? (Avec un sourire de triomphe.) Ils y coupent ! (Avec emportement.) Vous y coupez, messieurs du Tuscarora ! (Il entre dans la plus violente colère, et pousse des cris épouvantables ; puis, se calmant un peu, dit à Silvérie.) Il n’y a pas dans la langue française ni dans aucune langue européenne de mots suffisants pour caractériser ton cas. Sais-tu à quoi j’en suis réduit ? J’en suis réduit aux rudes onomatopées, comme nos ancêtres des cavernes. Tu es la dernière des ha ! ha ! ha !… une hou ! hou ! hou ! de bas étage… et, pour me résumer, … une hi ! hi ! hi ! (Après réflexion.) Une hi ! hi ! hi ! C’est le mot.

Silvérie

Mon ami… si j’avais su que tu serais si furieux… J’ai cru bien faire…

Dodeau, d’une voix douce et lui caressant les joues.

Non… Non… ne dis rien davantage. (Montrant son front, et plaintivement.) Ceci est un crâne humain, où il y a de la cervelle humaine. Ça n’a pas une résistance sans limite.