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PLANTES CULTIVÉES POUR LEURS TIGES OU FEUILLES

les régions élevées, où l’espèce ne peut pas vivre. Depuis qu’on a su extraire la partie essentielle du Coca et qu’on a reconnu ses avantages comme tonique, propre à faire supporter des fatigues sans avoir les inconvénients des boissons alcooliques, il est probable qu’on essayera d’en répandre la culture, soit en Amérique, soit ailleurs. Ce sera, par exemple, dans la Guyane, l’archipel Indien ou les vallées de Sikkim et Assam, dans l’Inde. car il faut de l’humidité dans l’air et de la chaleur. La gelée surtout est nuisible à l’espèce. Les meilleures localités sont sur les pentes de collines, où l’eau ne séjourne pas. Une tentative faite autour de Lima n’a pas réussi, à cause de la rareté des pluies et peut-être d’une chaleur insuffisante[1].

Je ne répéterai pas ici ce qu’on peut trouver dans plusieurs excellentes publications sur le Coca[2] ; je dirai seulement que la patrie primitive de l’espèce, en Amérique, n’est pas encore suffisamment certaine. Le Dr Gosse a constaté que les anciens auteurs, tels que Joseph de Jussieu, de Lamarck et Cavanilles, n’avaient vu que des échantillons cultivés. Mathews en avait récolté au Pérou dans le ravin (quebrada) de Chinchao[3], ce qui parait devoir être une localité hors des cultures. On cite aussi comme spontanés des échantillons de Cuchero, rapportés par Poeppig[4] ; mais le voyageur lui-même n’était pas assuré de la condition spontanée[5]. D’Orbigny pense avoir vu le Coca sauvage sur un coteau de la Bolivie orientale[6]. Enfin M. André a eu l’obligeance de me communiquer les Erythroxylon de son herbier, et j’ai reconnu le Coca dans plusieurs échantillons de la vallée de la rivière Cauca, dans la Nouvelle-Grenade, portant l’indication : en abondance, spontané ou subspontané. M. Triana cependant ne reconnaît pas l’espèce comme spontanée dans son pays, la Nouvelle-Grenade[7]. L’extrême importance au Pérou, sous le régime des Incas, comparée à la rareté de l’emploi à la Nouvelle-Grenade, fait penser que les localités de ce dernier pays sont en effet des cultures, et que l’espèce est originaire seulement de la partie orientale du Pérou et de la Bolivie, conformément aux indications de divers voyageurs susnommés.

Indigotier des teinturiers. — Indigofera tinctoria, Linné.

Il a un nom sanscrit, Nili[8]. Le nom latin Indicum montre que les Romains connaissaient l’indigo pour une substance

  1. Martinet, dans le Bull. de la Soc. d’acclimatation, 1871, p. 449.
  2. En particulier dans le résumé très bien fait du Dr Gosse, intitulé : Monographie de l’Erytroxylon Coca, br. in-8o, 1861 (tirée à part des Mém. de l’Acad. de Bruxelles, vol. 131.
  3. Hooker, Companion to the Bot. mag., 2, p. 25.
  4. Peyritsch, dans Flora brasil., fasc. 81, p. 156.
  5. Hooker l. c.
  6. Triana et Planchon. dans Ann. sc. vol., sér. 4, vol. 18, p. 338.
  7. Gosse, Monogr., p. 13.
  8. Roxburgh, Flora indica. 3, p. 379.