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CARTHAME — SAFRAN

qu’on deux noms sanscrits, Cusumbha et Kamalottara, dont le premier a laissé plusieurs descendants dans les langues actuelles de la péninsule[1]. Les Chinois ont reçu le Carthame seulement au IIe siècle avant Jésus-Christ. C’est Chang-kien qui le leur a apporté de la Bactriane[2]. Les Grecs et les Latins ne l’ont probablement pas connu, car il est très douteux que ce soit la plante dont ils ont parlé sous le nom de Cnikos ou Cnicus[3]. Plus tard, les Arabes ont beaucoup contribué à répandre la culture du Carthame, qu’ils appellent Qorton, Kurtum, d’où Carthame, ou Usfur, ou Ihridh, ou Morabu[4], diversité qui indique une existence ancienne dans plusieurs contrées de l’Asie occidentale ou de l’Afrique. Les progrès de la chimie menacent cette culture, comme beaucoup d’autres ; mais elle subsiste encore dans le midi de l’Europe, en Orient, dans l’Inde et dans toute la région du Nil[5].

Aucun botaniste n’a trouvé le Carthame dans un état vraiment spontané. Les auteurs l’indiquent avec doute comme originaire ou de l’Inde ou d’Afrique, en particulier d’Abyssinie ; mais ils ne l’ont vu absolument qu’à l’état cultivé ou avec l’apparence d’être échappé des cultures[6]. M. Clarke[7] ancien directeur du jardin de Calcutta, qui a revu depuis peu les Composées de l’Inde, admet l’espèce à titre de cultivée seulement. Le résumé des connaissances actuelles sur les plantes de la région du Nil, en y comprenant l’Abyssinie, par MM. Schweinfurth et Ascherson[8], indique également l’espèce comme cultivée, et les listes de plantes du voyage récent de Rohlfs n’indiquent pas non plus le Carthame spontané[9].

L’espèce n’ayant été trouvée sauvage ni dans l’Inde ni en Afrique et sa culture ayant existé cependant depuis des milliers d’années dans ces ceux pays, j’ai eu l’idée de chercher l’origine dans la région intermédiaire. Ce procédé m’a réussi dans d’autres cas.

Malheureusement, l’intérieur de l’Arabie est presque inconnu, et Forskal, qui a visité les côtes du Yemen, n’apprend rien sur le Carthame. Il en est de même des opuscules publiés sur les plantes de Botta et de Bové. Mais un Arabe, AbuAnifa, cité par Ebn Baithar, auteur du XIIIe siècle, s’est exprimé comme suit[10] :

  1. Piddington, Index.
  2. Bretschneider, Study and value, etc., p. 15.
  3. Voir Targioni, Cenni storici, p. 108.
  4. Forskal, Flora ægypt., p. 73 ; Ebn Baithar, trad. allemande, 2, p. 196, 293 ; 1, p. 18.
  5. Voir Gasparin, Cours d’agriculture, 4, p. 217.
  6. Boissier, Fl. orient., 3, p. 710 ; Oliver, Flora of tropical Africa, 1, p. 439.
  7. Clarke, Compositæ indicæ, 1876, p. 244.
  8. Schweinfurth et Ascherson, Aufzählung, p. 283.
  9. Rohlfs, Kufra, in-8, 1881.
  10. Ebn Baithar, 2, p. 106.