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PRUNIER DOMESTIQUE

servation, il me paraît impossible de considérer les trois formes comme constituant une seule espèce, à moins qu’on ne montre des transitions de l’une à l’autre dans les organes que la culture n’a pas altérés, ce qu’on n’a pas fait jusqu’à présent. Tout au plus peut-on admettre la fusion des deux premières catégories. Les deux formes à fruit naturellement doux se présentaient dans quelques pays. Elles ont dû tenter les cultivateurs, plus que le Prunus spinosa, dont le fruit est acerbe. C’est donc à elles qu’il faut s’efforcer de rapporter les Pruniers cultivés.

Je vais en parler, pour plus de clarté, comme de deux espèces[1].

Prunier domestique. — Prunus domestica, Linné. — Zwetchen des Allemands.

Plusieurs botanistes[2] l’ont trouvé, à l’état sauvage, dans toute l’Anatolie, la région au midi du Caucase et la Perse septentrionale, par exemple autour du mont Elbrouz.

Je ne connais pas de preuve pour les localités du Cachemir, du pays des Kirghis et de Chine, dont il est question dans quelques flores. L’espèce en est souvent douteuse, et il s’agit plutôt du Prunus insititia ; dans d’autres cas, c’est la qualité de plante spontanée, ancienne, qui est incertaine, car évidemment des noyaux ont été dispersés à la suite des cultures. La patrie ne paraît pas s’étendre jusqu’au Liban, quoique les prunes cultivées, à Damas aient une réputation qui remonte au temps de Pline. On croit que Dioscoride[3] a désigné cette espèce sous le nom de Coccumelea de Syrie, croissant à Damas. Karl Koch raconte que des marchands des confins de la Chine lui ont affirmé la fréquence de l’espèce dans les forêts de la partie occidentale de l’empire. Les Chinois cultivent, il est vrai, divers Pruniers depuis un temps immémorial, mais on ne les connaît pas assez pour en juger, et l’on ignore s’ils sont vraiment indigènes. Aucun de nos Pruniers n’ayant été trouvé sauvage au Japon ou dans la région du fleuve Amur, il est assez probable que les espèces vues en Chine sont différentes des nôtres. Cela paraît aussi résulter de ce que dit Bretschneider[4].

L’indigénat du Pr. domestica est très douteux pour l’Europe. Dans les pays du Midi, où il est mentionné, on le voit surtout dans les haies, près des habitations, avec les apparences d’un arbre à peine naturalisé, maintenu çà et là par un apport incessant de noyaux hors des plantations. Les auteurs qui ont vu l’espèce en Orient n’hésitent pas à dire qu’elle est subspontanée.

  1. Hudson, Flora anglica (1778), p. 212, les réunit sous le nom de Prunus communis.
  2. Ledebour, Fl. ross., 2, p. 5 ; Boissier, Fl. orient., 2, p. 652 ; K. Koch, Dendrologie, 1, p. 94 ; Boissier et Buhse, Aufzähl Transcaucas., p. 80.
  3. Dioscorides, l. c., 174 ; Fraas, Fl. class., p. 69.
  4. Bretschneider, On the study, etc., p. 10.