Page:Alphonse de Candolle - Origine des plantes cultivées, 1883.djvu/220

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
206
PLANTES CULTIVÉES POUR LEURS FRUITS

variables. Elles sont classées par l’auteur dans dix groupes, qu’il appelle Cantaloups, Melons brodés, Sucrins, Melons d’hiver, serpents, forme de concombre, Chito, Dudaïm, rouges de Perse et sauvages, chacun contenant des variétés ou races voisines les unes des autres. Celles-ci ont été nommées de 25 à 30 manières différentes par des botanistes qui, sans s’inquiéter des transitions de forme, de la faculté de croisement ou du peu de fixité dans la culture, ont désigné comme espèces tout ce qui diffère plus ou moins dans un temps et un lieu donnés.

Il résulte de là que plusieurs formes qu’on avait trouvées à l’état sauvage et qu’on décrivait comme espèces doivent être les types ou souches des formes cultivées, et M. Naudin fait la réflexion très juste que ces formes sauvages plus ou moins différentes l’une de l’autre ont pu donner des produits cultivés différents. C’est d’autant plus probable qu’elles habitent quelquefois des pays assez éloignés, comme l’Asie méridionale et l’Afrique tropicale, de sorte que les diversités de climat, combinées avec l’isolement, ont pu créer et consolider les différences.

Voici les formes que M. Naudin énumère comme sauvages :

1o Celles de l’Inde, qui ont été nommées par Willdenow Cucumis pubescens, et par Roxburgh C. turbinatus ou C. Maderaspatanus. Leur habitation naturelle est l’Inde anglaise dans toute son étendue et le Belouchistan. La qualité spontanée est évidente, même pour des voyageurs non botanistes[1]. Les fruits varient de la grosseur d’une prune à celle d’un citron. Ils sont unis, rayés ou bariolés à l’extérieur, parfumés ou sans odeur. La chair en est sucrée, fade ou aigrelette, différences qui rappellent beaucoup celles des Cantaloups cultivés. D’après Roxburgh, les Indiens récoltent les fruits du turbinatus et du Maderaspatanus, qu’ils ne cultivent pas, mais dont ils aiment la saveur.

Si l’on consulte la flore la plus récente de l’Inde anglaise, où M. Clarke a décrit les Cucurbitacées (2, p. 619), il semble que cet auteur ne s’accorde pas avec M. Naudin sur les formes indiennes spontanées, quoique tous deux aient examiné les nombreux échantillons de l’herbier de Kew. La différence d’opinion, plus apparente que réelle, tient à ce que l’auteur anglais rapporte à une espèce voisine, Cucumis trigonus, Roxburgh, certainement sauvage, les formes que M. Naudin classe dans le Cucumis Melo. M. Cogniaux[2], qui a vu depuis les mêmes échantillons, attribue seulement le C. turbinatus au trigonus. La distinction spécifique des C. Melo et C. trigonus est malheureusement obscure, d’après les caractères donnés par les trois auteurs. La principale différence est que le Melo est annuel, l’autre vivace, mais cette durée ne parait pas bien constante.

  1. Gardener’s chronicle, articles signés : J. H. H., 1857, p. 153 : 1858, p. 130.
  2. Cogniaux, dans Monogr. Phaner., 3, p. 485.