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ARBRE À PAIN. — JACQUIER

des îles de la Sonde. Les auteurs modernes, moins attentifs ou n’ayant observé que des pieds cultivés, ne s’expliquent pas à cet égard. Pour les îles Fidji, Seemam[1] dit : « Cultivé et selon toutes les apparences sauvage dans quelques localités ». Sur le continent du midi de l’Asie il n’est pas même cultivé, le climat n’étant pas assez chaud.

Évidemment, l’Arbre à pain est originaire de Java, Amboine et îles voisines ; mais l’ancienneté de sa culture dans toute la région insulaire, prouvée par la multitude des variétés, et la facilité de sa propagation par des drageons et des boutures empêchent de connaître exactement son histoire. Dans les îles de l’extrémité orientale, comme 0-Taïti, certaines fables et traditions font présumer une introduction qui ne serait pas très ancienne, et l’absence de graines le confirme[2].

Jacquier ou Jack. — Artocarpus integrifolia, Linné.

Le fruit du Jacquier, plus gros que celui de l’Arbre à pain, car il pèse jusqu’à 80 livres, est suspendu aux branches d’un arbre de 30 à 50 pieds de hauteur[3]. Si le bon La Fontaine l’avait connu, il n’aurait pas écrit sa fable du gland et de la citrouille.

Le nom vulgaire est tiré des noms indiens Jaca ou Tsjaka.

Le Jacquier est cultivé depuis longtemps dans l’Asie méridionale, du Punjab à la Chine, de l’Himalaya aux îles Moluques. Il ne s’est pas introduit encore dans les petites îles plus à l’orient, comme 0-Taïti, ce qui fait présumer une date moins ancienne dans l’archipel indien que sur le continent asiatique. Du côté nord-ouest de l’Inde, la culture ne date peut-être pas non plus d’une époque très reculée, car on n’est pas certain de l’existence d’un nom sanscrit. Roxburgh en cite un, Punusa, mais après lui Piddington ne l’admet pas dans son Index. Les Persans et les Arabes ne semblent pas avoir connu l’espèce. Son fruit énorme les aurait pourtant frappés si l’espèce avait été cultivée près de leurs frontières. Le Dr  Bretschneider ne parle pas d’Artocarpus dans son opuscule sur les plantes connues des anciens Chinois, d’où l’on peut inférer que vers la Chine, comme dans les autres directions, le Jacquier n’est pas un arbre répandu depuis une époque très ancienne.

La première notion sur son existence à l’état sauvage est donnée par Rheede dans des termes contestables : « Cet arbre croit partout au Malabar et dans toute l’Inde. » Le vénérable auteur confondait peut-être l’arbre planté et l’arbre spontané. Après lui cependant, Wight a trouvé l’espèce, à plusieurs re-

  1. Seemann, Flora Vitiensis, p. 255.
  2. Seemann, l. c. ; Nadeaud, Enum, des plantes indigènes de Taïti, p. 44 ; Id., Plantes usuelles des Tahitiens, p. 24.
  3. Voir les planches de Tussac, Flore des Antilles, pl. 4, et Hooker, Botanical magazine, t. 2833, 2834.