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SALSIFIS, SCORSONÈRE

Gookin, auteur américain sur les coutumes des indigènes, dit que ceux-ci mettaient des morceaux de Topinambour (Jerusalem artichoke) dans leurs potages[1].

Les analogies botaniques et les témoignages de contemporains s’accordent, comme on voit, dans le sens de l’origine du nord-est de l’Amérique. Le Dr  Asa Gray, voyant qu’on ne trouvait pas la plante sauvage, l’avait supposée une forme de l’H. doronicoides de Lamarck, mais on dit maintenant qu’elle est spontanée dans l’état d’Indiana[2].

Le nom Topinambour paraît venir de quelque nom réel ou supposé des langues américaines. Celui des Anglais, Jérusalem artichoke, est une corruption de l’italien Girasole (Tournesol), combinée avec une allusion au goût d’artichaut de la racine.

Salsifis.Tragopogon porrifolium, Linné.

Le salsifis ou, comme on écrivait jadis, Sercifi[3], était plus cultivé il y a un siècle ou deux qu’à présent. C’est une Composée bisannuelle, qu’on trouve à l’état sauvage en Grèce, en Dalmatie, en Italie et même en Algérie[4]. Elle s’échappe assez souvent des jardins dans l’ouest de l’Europe et se naturalise à moitié[5].

Les commentateurs[6] attribuent le nom Tragopogon (barbe de bouc) de Théophraste tantôt à l’espèce actuelle et tantôt au Tragopogon crocifolium, qui croît également en Grèce. Il est difficile de savoir si les anciens cultivaient le Salsifis ou le recueillaient dans la campagne. Dans le XVIe siècle, Olivier de Serres dit que c’était une culture nouvelle pour son pays, le midi de la France. Notre mot Salsifis vient de l’italien Sassefrica, qui frotte les pierres, sens qui n’a rien de raisonnable.

Scorsonère d’Espagne.Scorzonera hispanica, Linné.

On donne quelquefois à cette plante le nom de Salsifis ou Salsifis d’Espagne, parce qu’elle ressemble au salsifis (Tragopogon porrifolium) ; mais sa racine est brune extérieurement : d’où viennent le nom botanique et celui d’écorce noire, usité dans quelques provinces.

Elle est spontanée en Europe, depuis l’Espagne, où elle est commune, le midi de la France et l’Allemagne, jusqu’à la région du Caucase et peut-être jusqu’en Sibérie, mais elle manque

  1. Pickering, Chronol. arrang., p. 749, 972.
  2. Catalogue of Indiana plants, 1881, p. 15.
  3. Olivier de Serres, Théâtre de l’agriculture, p. 470.
  4. Boissier, Flora orient., III, p. 745 ; Visiani, Fl. dalmat., II, p. 108 ; Bertoloni, Fl. ital., VIII, p. 348 ; Gussone, Synopsis fl. siculæ, II, p. 384 ; Munby, Catal. Alger., éd. 2, p. 22.
  5. A. de Candolle, Géogr. bot. raisonnée, p. 671.
  6. Fraas, Synopsis fl. class., p. 196 ; Lenz, Botanik der Alten, p. 485.