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ANTHOLOGIE FÉMININE

faites pour l’entourer. Elle filait aussi, mais elle était placée de manière à ce qu’on ne vît pas ses traits. À moitié cachée par son attitude et par sa coiffure, elle était vêtue comme les autres et paraissait pourtant plus distinguée. Valérie se reconnut dans cette scène naïve de sa jeunesse, où elle s’était plu, comme elle le faisait souvent, à travailler au milieu de plusieurs jeunes filles qu’on élevait chez ses parents, qui, riches et bienfaisants, recueillaient des enfants pauvres, les élevaient et les dotaient ensuite. Elle comprit que j’avais voulu lui retracer le jour où le comte la vit pour la première fois et la surprit au milieu de cette scène aimable et naïve. Dès lors, charmé de sa candeur et de ses grâces, il l’aima tendrement.

Mais revenons à ce miroir magique qui ramenait Valérie au passé. Des jeunes filles, élevées dans le Conservatoire des Mendicanti, formaient un groupe, costumées comme nos paysannes suédoises ; elles chantaient mieux qu’elles, et, au lieu de leurs romances, nous entendîmes des couplets composés pour la comtesse, accompagnés par Frédéric et Ponto, placés de manière à ne pas être aperçus. Les voix ravissantes des Mendicanti, le talent de ces artistes fameux, la sensibilité de Valérie, contagieuse pour les autres, tout fit de ce moment un moment délicieux, et les Italiens, habitués à exprimer fortement ce qu’ils sentent, mêlèrent leurs acclamations à la joie douce que me faisait ressentir le bonheur de Valérie.

Le bal commença dans une des salles attenantes ; tout le monde s’y précipita. La toile étant tombée, on vit reparaître le clair de lune. Valérie resta avec son mari ;