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TROISIÈME PÉRIODE

avoir chaudement admiré, dit : « C’est très beau, mais c’est trop généreux. J’aurais voulu qu’on dit des choses désagréables à ce monsieur. J’ai le préjugé de la patrie ; j’aurais aimé à répondre à cet Allemand des vers cruels. — Moi aussi ! s’écria Alfred de Musset. — Faites-les donc vite », reprirent en chœur tous les assistants. On enferma le poète dans le jardin en lui donnant deux cigares et ce qu’il faut pour écrire.

Un quart d’heure après, on lui rouvrit, la célèbre poésie était écrite.

Jules Janin raconte ainsi les funérailles de cette remarquable et inoubliable femme, dont la gloire, dans sa modestie et sa suavité, survivra peut-être à celle de son mari.

Le deuil fut immense autour de ce cercueil ; on vit arriver, poussés par une commune douleur, les jeunes gens et les vieillards : les vieillards, qui l’avaient adoptée enfant, les jeunes gens, charmés de son esprit, attentifs au passage de ce convoi funèbre, et qui saluaient, en la saluant, tant de grâce et tant d’esprit, tant de belle prose et tant de beaux vers ! Ainsi pleurée, ainsi laissant une trace profonde dans le souvenir de la famille lettrée, elle a touché enfin à l’accomplissement de ce rêve qui avait été le rêve de ses seize ans : « Que c’est beau, disait-elle aux funérailles du général Foy, que c’est beau d’aller ainsi à la tombe, au milieu de tant de gens qui vous pleurent, et qui jettent des couronnes d’immortelles sur votre cercueil ! »