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TROISIÈME PÉRIODE

Une table de pierre inclinée se relève par ressauts abrupts en crêtes basses, hérissées, rageuses, dont la ligne tourmentée se découpe aiguë sur le bleu vif de l’horizon. Par places, une herbe rase, calcinée, où les grillons mènent leur chœur assourdissant, où bruissent les cigales ivres de chaleur. Dans les crevasses rampent de minuscules liserons roses, se blottissent de petites touffes de mauves, s’aplatissent les larges corolles d’un jaune verdissant. Thym, lavandes et menthes se pâment au soleil en exhalant leurs fortes odeurs poivrées.

Étrange paysage dont la tonalité grise et fauve est égayée par le blanc et le pourpre des églantiers qui fleurissent mêlés aux buissons de genévriers et de jujubiers à la silhouette rêche.

Nous montons à travers un éboulis de pierrailles rouges et des maquis de chênes kermès — une âpre garrigue peuplée de lapins et de grands lézards verts. Dans les tailles abandonnées de carrières qui font comme des sabrures blanches, mûrit un seigle clairsemé, et quelques figuiers s’agrippent, énergiques et vivaces, aux fissures où le vent a apporté un peu de terre végétale. Un désert couleur d’ocre, où le cours de rares ruisselets est marqué par des verdures maigres. De loin en loin, un pauvre essai de jeune vigne altérée.


GEORGES DE PEYREBRUNE


Le style pittoresque de Mme  de Peyrebrune mérite une place dans la fin du XIXe siècle.