Page:Alzog - Histoire universelle de l’Église, tome 1.djvu/221

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La vertu ne consista plus pour eux, comme pour l’antique stoïcien, dans la lutte, mais dans la patience. Ils ne voyaient dans le Christianisme qu’une erreur populaire, à la fois nuisible et méprisable. L’indifférentisme sophistique et éclectique fut bien plus dangereux pour les chrétiens. Les sceptiques ne s’étaient d’abord moqués que des tentatives faites pour spiritualiser les croyances populaires du paganisme ; plus tard, ils attaquèrent le Christianisme lui-même ; tels furent Lucien, de Samosate [v. 200], et Celse [apr. 150]. Lucien analysa avec une grande sagacité la plupart des systèmes philosophiques, dévoila les folies des fables mythologiques, frappant les uns et les autres du fouet de sa sanglante satire. Partant de ce principe : Il n’y a de démontrable que ce que les sens peuvent atteindre ; au delà, il n’y a que folie ; — Il se riait d’un côté, de la foi aux dieux du paganisme, qu’on avait prétendu spiritualiser, aussi bien que du Christianisme et de ses tendances vraiment spiritualistes, et, de l’autre, il se moquait d’Apollonius de Tyane, chef de la philosophie fantastique et fanatique du siècle, aussi bien que du Christ, divin idéal de la secte nouvelle. Ses sarcasmes contre la charité fraternelle et le courage des martyrs chrétiens, qu’il traitait d’hommes abusés, ses plaisanteries contre leurs vertus héroïques, qu’il qualifiait d’aveugle superstition, sont un témoignage d’autant plus puissant en leur faveur qu’il est tout à fait involontaire[1]. Celse (qui est probablement celui à qui Lucien dédia son Alexandre), quoique épicurien de fait, adopta, pour combattre plus sérieusement le Christianisme, les opinions des platoniciens et des stoïciens. Son Discours de la vérité est une réfutation continuelle d’Origène[2]. Il y at-

  1. Luciani Opp. ed. Lehmann. Lipsiæ, 1822, 9 t. Il ne parle du Christianisme que dans Ἀλέξανδρος ἥ ψευδόμαντις (Alexandros hê pseudomantis), c. 25, 28, Περὶ τῆς περεγρίνου τελευτῆς (Peri tês peregrinou teleutês), c. 11-16. Ἀληθής ἱστορία (Alêthês historia), I, 22, 30 ; II, 4, 11. Cf. Eichstadii Progr. Lucianus num scriptis suis adjuvare religionem christ. voluerit ? C.-G. Jacob, Caractère de Lucien. Hamb., 1832. Sur le dialogue Philopatris, faussement attribué à Lucien, voy. plus bas, § 103 ad init.
  2. Celsus, Ἀληθής λόγος (Alêthês logos) (Opp. Orig. ed. De la Rue, t. I). Cf. Fenger, de Celso epicureo. Havn., 1828 ; de Celso disputatur et fragmenta libri contr. Christ. colliguntur. Regiom., 1836, in-4. Philippi de Celsi philosophandi genere. Berol., 1836.