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propager l’Église de Jésus-Christ. Le sang des martyrs, disait Tertullien, est une semence de chrétiens. Le martyre est un des caractères propres de l’Église catholique. Une avec et dans le corps de Jésus-Christ[1], elle s’unit encore à lui dans le martyre de la croix, et le partage. Seuls, ses adhérents meurent, nombreux et joyeux, pour leur foi, tandis que les schismatiques, les hérétiques, rameaux desséchés de l’arbre de la croix, meurent rarement dans le martyre[2] : Il est inutile, disent-ils, de confesser sa foi devant les hommes, la confession intérieure suffit : le martyre est un suicide. Ce sont les sophismes de la lâcheté, répondait l’Église catholique, en les anathématisant[3] ; sa maxime invariable était que la communauté intérieure des fidèles doit se réaliser par le fait d’une communauté extérieure. Quand on a la foi dans le cœur, on est prêt à la confesser ouvertement au besoin : renier la communion extérieure avec l’Église, c’est perdre l’union intérieure avec Jésus-Christ. Plutôt donc que de se séparer du Christ, qui est la vie, les chrétiens s’écriaient : La mort est notre gain ! et le jour du martyre était le vrai jour de naissance fêté parmi eux[4]. Mais qu’était-ce que la mort, auprès du déshonneur dont on cherchait à flétrir les Vierges chrétiennes[5] ! Tandis que les apostats, trop nombreux souvent, étaient rejetés de l’Église catholique, ceux qui persévéraient dans la foi, invisiblement unis aux martyrs, se plaisaient à proclamer leurs

  1. Ignat. ep. ad Tralliau., c. 11.
  2. Justin. Apolog. I, c. 26. Tertull. Scorpiace, c. 1 : « Quum igitur fides æstuat, et Ecclesia exuritur de figura rubi, tunc Gnostici erumpunt, tunc Valentiniani proserpunt, tunc omnes martyriorum refragatores ebulliunt, calentes et ipsi offendere, figere, occidere. p. 616.
  3. Clem. Alexand. Strom. IV, 4, p. 571. Les uns disent : Confesser Dieu, voila le martyre ; les autres : confesser Dieu aux dépens de sa vie, c’est un suicide ; d’autres encore trouvent dans leur crainte des sophismes nouveaux. Mais l’Église catholique demande de ses membres, non pas qu’on se mette en avant, même pour de bons motifs, mais qu’on reconnaisse publiquement devant les puissances la foi au Fils de Dieu, qu’on la défende au besoin, et que toujours on soit prêt à sacrifier pour elle sa vie et a sceller sa croyance de son sang. Cf. Strom. IV, 7, p. 582 sq. ; IV, 10, p. 597.
  4. Kortholt. de Martyr. natalitis in prim. Eccl. Francof., 1698. Sagittarii lib. de Martyr, natal. in prim. Eccl. Francof., 1696.
  5. August., De Civit. Dei, I, 26-29.