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Page:Alzog - Histoire universelle de l’Église, tome 1.djvu/262

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qu’un enseignement à la fois religieux et philosophique, mystique et allégorique, préparait longtemps d’avance. Les manichéens avaient aussi une hiérarchie marquée et complète : c’étaient douze maîtres avec un chef, soixante-douze évêques, des prêtres et des diacres. Le culte exotérique était tout à fait spirituel, sans autels ni cérémonies, et devait faire contraste avec celui des catholiques (semi-chrétiens). Ils jeûnaient le dimanche et célébraient le jour anniversaire de la mort de Manès comme une grande fête ecclésiastique (βῆμα). Le culte ésotérique était entièrement secret et mystérieux. Il consistait dans le baptême et la cène. On baptisait vraisemblablement avec de l’huile, on célébrait la cène sans vin.

Quant à la morale, Manès posait comme but principal la libération aussi complète que possible de la matière, et il exigeait des élus de sanctifier les trois sceaux de la bouche des mains et du cœur (signaculum oris, manuum et sinus). Le premier de ces sceaux défendait tout blasphème, surtout contre le Paraclet, l’usage de la viande et des boissons enivrantes. Le sceau de la main défendait le meurtre, les mauvais traitements des bêtes et des plantes, ainsi que l’exécution de travaux vulgaires. Le sceau du cœur prohibait tout désir sexuel et toute cohabitation conjugale. Les catéchumènes veillaient à l’entretien des parfaits, qui se nourrissaient en grande partie d’olives et d’autres végétaux. Les catéchumènes n’étaient pas tenus à toutes ces privations : ils pouvaient cultiver la terre et professer des métiers. Ils obtenaient facilement la rémission des fautes commises dans ces occupations, et qui ne pouvaient atteindre l’âme, susceptible de honte et de remords, mais incapable du mal lui-même. Et c’est pourquoi, comme s’en plaignit Éphraïm le Syrien, ils ne voulaient pas même qu’on songeât à se repentir ou à faire pénitence du mal, parce qu’on ne faisait, disaient-ils, que l’entretenir par là[1].

  1. Wegnern, Manich. indulgentiæ (?), cum brev. manichæismi adumbrat. Lipsiæ, 1827. Voyez, quant à l’ignorance complète ou aux autres motifs qui ont fait confondre, par cet auteur, la doctrine catholique des indulgences et de la rémission des péchés avec les opinions des manichéens, Zingerlé, des Indulgences des manich. et de leur comparaison avec l’Église cath. (Revue théol. de Tubingue, ann. 1841, p. 574-602).