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Page:Alzog - Histoire universelle de l’Église, tome 1.djvu/295

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passe pour le maître de Cyprien, évêque de Carthage[1], théologien de la même école, remarquable par une éloquence limpide et profonde, pleine de séve et de cœur.

L’opposition de ces théologiens, parfois véhémente dans son langage, portant surtout sur l’abus de la philosophie et la fausse gnose[2], et le plus souvent provoquée par elles, était par là même plutôt une opposition extérieure. C’est ainsi que Tertullien se prononçait avec une grande vivacité contre la dialectique, tout en en faisant, en maintes circonstances, un plus vigoureux usage que ses plus chauds partisans. Que si, en général, cette opposition a entravé les théologiens de l’Occident dans leur direction spéculative, elle les a, d’un autre côté, préservés des excès de cette direction, garantis de la confusion de la philosophie et de la théologie, et maintenus dans les limites d’une sage réserve.

Cependant, les théologiens d’Occident, tout en combattant la tendance spéculative, en prirent peu à peu, et sans presque s’en apercevoir, ce qu’elle a de bon. C’est ainsi que les deux directions théologiques se complétèrent l’une par l’autre. De leur contre-poids dépend l’équilibre, comme de leur union la vérité du développement de l’esprit chrétien.

  1. Le rapport de saint Cyprien et de Tertullien ressort bien de la comparaison du traité qu’ils ont écrit l’un et l’autre sur la prière, de Oratione (dominica), et de l’Apologétique de Tertullien, avec l’écrit de Vanitate idolorum de Cyprien.
  2. Cf. Iren. Adv. Hær. II, 14, n. 7 « Utrum hi omnes, qui prædicti sunt (Platon, les Stoïciens, auxquels les Valentiniens empruntaient leurs dogmes), cum quibus eadem dicentes arguimini, cognoverunt, superflua est Salvatoris in hunc mundum descensio. Ut quid enim descendebat ? Numquid ut eam, quæ cognoscebatur veritas, in agnitionem adduceret his, qui cognoscunt eam, hominibus ? Si autem non cognoverunt, quemadmodum eadem cum his, qui veritatem non cognoscebant, dicentes, solos ipsos eam, quæ est super omnia cognitio, habere gloriamini, quam etiam, qui ignorant Deum, habent ? Secundum antiphrasin ergo veritatis ignorantiam agnitionem vocant. » Tertullien dit de même, de Anima, c. 1 : « Cui veritas comperta sine Deo, cui Deus cognitus sine Christo, cui christus exploratus sine Spiritu sancto, cui Spiritus sanctus accommodatus sine fidei sacramento ? Sane Socrates facilius diverso spiritu agebatur. »