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Page:Améro - Le Tour de France d’un petit Parisien.djvu/29

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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

breux prisonniers ? D’ailleurs, chez plusieurs des ardents patriotes engagés dans cette entreprise, si grosse de périls, fermentait, il nous faut l’avouer, un besoin de vengeance provoqué par des attentats iniques, de cruelles injures, des humiliations imméritées. L’un de ces hommes, peu de temps auparavant, avait eu son frère fusillé comme soldat irrégulier. Plusieurs autres, faits prisonniers à Sedan, s’étaient échappés à la nage, sous une grêle de balles, de cet horrible camp de la Misère, où pendant dix jours, sous des pluies torrentielles, dans la boue profonde, sans pain, cent mille soldats français furent traités comme un vil troupeau ; ceux-là, animés d’une haine farouche contre de semblables ennemis, étaient venus s’engager dans les partisans des Vosges. Il y en avait qui, prisonniers, ou relevés blessés sur les champs de bataille, étaient parvenus à s’échapper jusqu’à trois fois…

Les infortunés landwehrs de Dusseldorf firent la cruelle expérience du retour de fortune qui menace tout soldat, et comprirent combien il est périlleux d’appartenir à des armées qui abusent de la force. En cette terrible minute qu’ils vécurent au milieu de cet ouragan de coups donnés et reçus, il en est qui durent voir se réaliser leurs plus sombres prévisions sur l’issue de la guerre ; car plus les Prussiens pénétraient au cœur de la France, moins ils espéraient en sortir.

Il n’a pas dépendu des compagnies franches des Vosges que leur exemple ne trouvât des imitateurs.

Dans le village, la chasse aux Prussiens avait commencé. Des coups de feu éclairaient la nuit dans diverses rues. D’une maison, sortit un soldat allemand tout effaré ; il courait la baïonnette haute, hésitant visiblement sur la direction à suivre pour rallier ses camarades attaqués…

Un chasseur des Vosges l’abattit d’un coup de fusil dans la nuque. Le Prussien tomba au moment où une manière de paysan, courant après lui en lui parlant, se trouvait arrêté par deux francs-tireurs, qui lui mirent la baïonnette sur la poitrine.

— Français ! dit-il, oh ! Français !

Une fenêtre en lucarne venait de s’ouvrir et de s’illuminer. Plusieurs voix de femmes crièrent d’en haut : — Ne le croyez pas ! Il est avec eux ! C’est un espion… Il est plus méchant que les autres.

Un sergent « bleu» sortit de l’ombre des maisons. — Collez-moi ça au mur, fit-il.

Jacob Risler guidait ce sergent à travers les ruelles du village. Quelle ne fut