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Page:Améro - Le Tour de France d’un petit Parisien.djvu/365

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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

On possédait ainsi deux palais, l’un de pierre, l’autre de fonte et de verre ; l’un bâti à demeure, l’autre provisoire. À eux deux, ces palais constituaient dans Paris toute une seconde ville. Une armée d’ouvriers travaillaient le jour et la nuit — à la lumière électrique — à cette création gigantesque. On voyait bien là, se disait Jean avec orgueil, que la France n’a point abdiqué…

Bientôt, du milieu des échafaudages, des palans et engins de toute sorte, se dégagèrent sur une vaste étendue les immenses constructions et, ce qui plaisait le plus aux regards de Jean, les édifices de couleur locale de la rue des Nations, défilé architectural, alignement comparatif de goûts et de styles divers, trompe-l’œil de l’effet le plus pittoresque.

Quoi de plus amusant pour le petit Parisien que toutes ces façades librement juxtaposées : façades anglaises, au nombre de cinq : habitation de ville, castel princier, murailles gothiques d’un Parlement ou d’une Université, cottage ; — façades des États-Unis, de Suède et Norvège, d’Italie, du Japon, — une porte à grandes poutres largement équarries, abritée sous un auvent — façades chinoise, espagnole, autrichienne, russe, suisse.

Les Belges avaient élevé un véritable palais, exposant à la fois un chef-d’œuvre de l’art flamand et les matériaux belges, avec une dépense de 600,000 francs au moins ; les Grecs montraient une maison athénienne du temps de Périclès ; l’Amérique du Sud et du Centre offraient un charmant balcon vitré, en saillie sur un portique à trois arcades ; puis c’était la Perse, Siam, Tunis et le Maroc associés pour une façade unique, où chacun de ces pays était représenté par un pan de l’édifice : une autre association réunissait le Luxembourg, le Val d’Andorre, Saint-Marin et Monaco. Et puis quoi enfin ? les façades des Pays-Bas, du Portugal, du Danemark…

Rien encore dans les galeries des beaux-arts, où les toiles de choix venues de l’étranger et les œuvres rétrospectives des peintres français attendaient, pour être découvertes, jusqu’à la dernière heure. Bien des tableaux même n’étaient pas encore mis en place.

Mais ce qui ravissait Jean, c’était de voir un groupe d’ouvriers déballant quelque grande pièce nouvellement arrivée. Toujours, il entraînait M. Pascalet de ce côté. Le moment viendrait bientôt de comparer les produits de l’industrie nationale. D’autres fois, Jean examinait un rangement dans les vitrines.

Et c’étaient de beaux livres, de belles reliures, des chromolithographies, des cartes murales, des instruments de précision ; les pianos de Nancy, dont la partie supérieure est en laque avec peintures, rivalisaient avec ceux des