Page:Amable Floquet - Anecdotes normandes, deuxieme edition, Cagniard, 1883.djvu/202

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tière de Saint-Nicaise une belle boise toute neuve, plus gigantesque encore que l’ancienne. À la vérité, elle ne faisait point de miracles ; elle était aussi plus endurante pour le mensonge, et le Menteur, en personne, aurait pu y raconter ses hauts faits et ses prouesses, que, ma foi ! elle ne se serait pas entr’ouverte d’un travers de doigt. Mais quoi ! le neuf vaut-il jamais le vieux ? Toutefois, cette attention délicate avait un peu modéré le courroux des Nicaisiens ; ce fut aux deux curés de se charger du reste. Ils n’avaient guère songé jusqu’alors à jeter de l’eau sur le feu, les dignes gens ; mais, dès le dimanche qui suivit la bataille, il fit beau les entendre prêcher, à qui mieux mieux ; la paix, l’union, la concorde ; c’était à fendre le cœur des plus endurcis.

« Mes petits-fils, disaient-ils, filioli, aimez-vous les uns les autres, et, sur toutes choses, évitez les jeux de main. À votre échauffourée dernière, qu’y avez-vous profité ? Les uns y ont perdu leur boise, les autres y ont gagné force bourrades. Ainsi en va-t-il de toutes les guerres. » Bref, ce furent de petits chefs-d’œuvre que ces prônes, des projets de paix perpétuelle, à l’usage des paroisses. O vénérable abbé de Saint-Pierre ! homme de bien, qui sus si bien rêver, que n’étais-tu de ce monde alors, et que n’entendais-tu ces harangues ? Comme tu aurais bien su t’en aider pour bâtir