Page:Amable Floquet - Anecdotes normandes, deuxieme edition, Cagniard, 1883.djvu/240

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bientôt à ses dépens. Tout d’abord, le rétablissement de cette juridiction l’avait pénétré d’une indicible douleur. Se séparant, alors, pour la première fois, du Parlement, avec qui, il avait, généralement, jugé d’accord jusqu’à cette heure : « Ils ont rétabli la Basoche (avait-il dit à ses affidés, avec l’accent d’un profond désespoir), mais souvenez-vous qu’ils s’en repentiront, et que c’est moi qui l’ai dit. » Toutefois, cette première douleur un peu calmée, le digne buvetier s’était mis à prendre en pitié ces petits juges de fraîche création, se promettant bien de n’en tenir compte, et se sachant même mauvais gré de s’être ainsi ému de si peu de chose. Lorsqu’il fallut ouvrir aux nouveaux juges la salle de la première chambre des Enquêtes, qui leur avait été assignée pour tenir leurs séances, s’y refusant net, quoiqu’on lui alléguât les ordres exprès du président De Bailleul, il voulait les conduire ailleurs, dans quelque obscur recoin du Palais ; mais c’était avoir compté sans les huissiers de la Basoche, deux vigoureux jeunes hommes, qui, le saisissant sous les aisselles, sans d’ailleurs lui faire mal, allèrent, en grand respect et cérémonie, le déposer tout ébahi à la Conciergerie, où peine lui fut de passer douze mortelles heures d’horloge, de soixante minutes chacune, comme on comptait dans ce temps-là ; et le pire fut que, lorsqu’il accourut, tout essouflé, le len-