Page:Amable Floquet - Anecdotes normandes, deuxieme edition, Cagniard, 1883.djvu/46

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pour que partout, sur leur passage, les têtes s’inclinent et les chaperons s’abaissent ?

Ainsi s’interrogeaient entre eux les innombrables habitants qui fourmillaient dans l’aître de Saint-Ouen. Mais, à mesure qu’approchait le cortège, retentissaient plus distinctement les cris : « Honneur à la charte aux Normands, octroyée par feu, de bonne mémoire, le roi Louis X, dont Dieu ait l’âme ! Bonnes gens, chaperon bas devant la charte aux Normands ! »

C’était elle, en effet, la charte aux Normands, que malgré les prêtres, malgré les satellites de l’archevêché, ils étaient allés prendre dans le trésor de la cathédrale, où elle était religieusement gardée avec les reliques et les châsses de la basilique ; car cette charte qui, naguère, avait donné aux Normands la liberté, elle était dans le trésor de Notre-Dame, tout près de la fierte de Saint-Romain, qui, une fois chaque année, donnait la vie.

Cependant elle s’avançait, la charte royale, portée, en grand respect, sur un carreau à glands d’or, par quatre bourgeois, têtes nues : alors vous eussiez vu tous les habitants, saisis d’enthousiasme, s’empresser, se heurter, pour la contempler de plus près, leur charte déjà jaunie par ses soixante-sept années d’existence ; pour mieux voir suspendu à des lacs de soie