Page:Amable Floquet - Histoire du privilege de saint Romain vol 1, Le Grand, 1833.djvu/342

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

toutes les villes de France, la mesintelligence entre les catholiques et les religionnaires était extrême ; dans le sac de 1562, qui avait duré trois jours, les soldats de l’armée royale, enivrés par une victoire long-tems disputée, s’étaient rués avec fureur sur tout ce qui s’était offert à leur convoitise ; tout avait été pillè, saccagé, détruit, sans distinction entre les biens des catholiques et ceux des religionnaires. Brantôme avait vu ce pillage ; quinze ou seize mois après, lorsqu’il revint à Rouen à la suite de Charles IX, à l’en croire « l’on n’y trouvoit plus rien à redire pour le sac, et la royne mère s’en estonna, tant ceste ville s’estoit bien remise, et estoit autant ample et opulente que devant, sy (tellement) ajoute-t-il, qu’il ne nous y manqua rien[1] ». Mais les dommages se réparent, et les souvenirs demeurent. Les catholiques ne pouvaient pardonner à leurs adversaires, auteurs de tous leurs maux ; et, de leur côté, ceux-ci n’avaient point oublié le supplice de leurs ministres et de leurs principaux chefs. Chaque jour on voyait les deux partis aux prises ; chaque jour, quelque scène nouvelle décelait de plus en plus une antipathie profonde, d’amers ressentimens, et annonçait, pour l’avenir, de nouveaux malheurs plus grands que ceux que l’on déplorait

  1. Brantôme, Discours lxxix. M. l’admiral de Chastillon.