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L’ATELIER D’INGRES.

j’ai appris tout seul ou à peu près, et je vous félicite bien d’avoir un maître comme le vôtre… Si je n’étais pas trop vieux, j’irais, je vous le jure, demander à M. Ingres ses conseils, comme un élève qui commence ; mais… j’en sais trop… ou pas assez. »

Je fus étonné de ces paroles, qui me donnèrent une plus haute idée encore que je ne pouvais l’avoir d’un artiste arrivé au point élevé où était Decamps, et faisant preuve d’une aussi grande modestie.

Les soirées que nous passions avec des hommes de cette valeur et d’autres moins considérables, mais pleins de verve et d’esprit, étaient plus qu’intéressantes pour moi : elles me furent d’une grande utilité dans ma carrière, car les discussions, qui ne cessaient qu’au moment de se séparer, quand elles ne continuaient pas sur l’escalier, n’avaient trait, bien entendu, qu’à des questions d’art ; si je n’étais pas toujours convaincu, j’y repensais plus tard avec tout mon sang-froid, et mes idées, un peu réalistes alors, perdirent de leur assurance. J’attribue certainement à ces controverses le changement qui se produisit dans ma manière de voir, que l’enseignement de M. Ingres, exagéré par ses élèves, avait un peu trop éloignée, je crois, du côté idéal.

Les visites au Vatican, où je faisais des cro-