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L’ATELIER D’INGRES.

Il examina tous ces ouvrages, qui étaient pour lui autant de souvenirs, avec un intérêt très-vif.

En voyant le petit tableau de Vénus blessée, qui n’était pas exempt de quelques bizarreries (les crinières des chevaux blancs du char d’Iris[1] et les roues du char étaient dorées), il me dit en souriant, et comme pour se défendre devant un élève :

« Oh ! cela… c’est un péché de jeunesse. »

Mais quand il vit le portrait de femme dessiné, je n’oublierai jamais son mouvement de recul et l’éclat de ses yeux. Enfin, au bout d’un instant : « Si j’ai fait quelque chose de bien dans ma vie, me dit-il, c’est ce dessin ; » et il le regarda longtemps, ne pouvant en détacher ses yeux.

Je ne m’explique pas comment je n’ai appris que longtemps après que ce portrait de femme était celui de la reine de Naples (Caroline Murat), probablement le croquis, l’idée première du grand portrait à l’huile qui fut exécuté, et qui a disparu on ne sait quand.

J’ai bien regretté de ne l’avoir pas su à l’époque où j’habitais Florence, car je fus accueilli par la reine avec tant de grâce et de bienveillance, qu’il m’eût été facile de la questionner sur

  1. Les chevaux dans l’esquisse d’Asseline, sont au repos. Ils sont cabrés dans la gravure au trait des œuvres d’Ingres.