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brise du sud-est favorisait notre marche, et nous avancions à pleines voiles. Tout le monde paraissait heureux, sauf ceux que le mal de mer attaquait. Nous étions en tout 430 personnes y compris l’équipage. Les passagers d’entre-pont, composés d’Irlandais et d’Écossais, se rendaient au Canada pour travailler à la construction d’un chemin de fer.

Le dimanche matin, 12 septembre, le vent, augmentant de violence, rompit le mât de proue, une partie du grand mât et le beaupré. Nous étions précisément au même endroit où le premier accident de ce genre nous était arrivé. Les passagers, craignant de continuer le voyage dans ces tristes conditions, se réunirent tous ensemble et conjurèrent le capitaine de revenir sur ses pas. Ils auraient mieux aimé, disaient-ils, perdre le prix de leur passage plutôt que de continuer le voyage dans un vaisseau qui semblait destiné à les faire souffrir et peut-être à les faire périr. Le capitaine fut inflexible et je crus un moment qu’une révolte allait éclater. Plusieurs passagers parlaient de se saisir du capitaine et de diriger le navire sur Liverpool. Monsieur Mason, recouvrant son sang-froid, s’efforça de nous prouver qu’il n’y avait pas de danger à continuer le voyage ainsi. Il commanda aux matelots de réparer le dégât et de remplacer les mâts