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moyen de sa lunette d’approche, aperçut en effet une montagne qu’il dit être l’île de Barra, formant partie du groupe des Hébrides. Nous étions heureux d’apercevoir la terre, que nous avions perdue de vue depuis dix-neuf jours. Il nous semblait que nous touchions déjà au port. Vaine illusion ! Chacun faisait part à ses amis de ses pensées et de ses espérances ; une agitation extraordinaire régnait sur le pont. Tout le monde paraissait joyeux, à l’exception du capitaine qui, appuyé sur une vergue du mât de perroquet, examinait souvent la terre, puis parlait au capitaine Rose et semblait être dans une inquiétude mortelle. Une fois même, je le vis verser des larmes. D’après ce que nous dit ce brave marin, nous devions voir pendant la nuit la lumière du phare de Barra Head, la dernière île des Hébrides. Le vent augmentait de violence, et nous nous sentions inquiets en nous voyant approcher rapidement de la terre ferme. Vers sept heures du soir, nous aperçûmes le phare, et nous vîmes avec consternation que nous nous dirigions vers de dangereux récifs. Cette île de Barra Head, comme nous l’avait dit le capitaine, est entourée de récifs et de brisants sur lesquels nous devions trouver une mort certaine. Le capitaine était en proie à la plus vive angoisse ; toutes les voiles furent dé-