où elle devait prendre le voile ; je suppliai les religieuses,
j’insistai sur la permission de parler à
ma sœur, je n’hésitai pas même à leur laisser voir
mes soupçons sur ce refus de paraître, auquel on
l’avait forcée peut-être. Pour se justifier de cette
imputation, l’abbesse m’envoya quelques lignes
où je ne pus méconnaître l’écriture d’Agnès, et
qui confirmaient le premier message. Les jours
suivants je ne réussis pas mieux dans mes efforts
pour me procurer avec elle un moment d’entretien.
Elle refusa constamment mes visites et ne me
permit de la voir que la veille du jour où elle devait
pour jamais s’ensevelir dans le cloître. Cette
entrevue eut pour témoins nos plus proches parents.
C’était la première fois que je la voyais depuis
son enfance, et nous fûmes vivement émus
l’un et l’autre ; elle se jeta dans mes bras, et fondant
en larmes, me prodigua les plus tendres caresses.
Raisons, instances, prières, je ne négligeai
rien pour lui faire oublier son projet ; je pleurai,
je me jetai à ses genoux, je lui représentai toutes
les peines inséparables du cloître ; je peignis à son
imagination tous les plaisirs auxquels elle allait
dire un éternel adieu ; je la conjurai de m’ouvrir
son cœur, de me confier ce qui avait pu lui ins-
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