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ces tragiques histoires. Cependant, il serait exagéré de charger la généralité des anciens nobles du reproche de férocité et de paillardise. Les roturiers avaient aussi une large part dans ces naissances irrégulières, mais leurs noms obscurs ne retiennent pas l’attention qu’on porte naturellement aux membres de familles patriciennes et connues.

Les bâtards m’ont paru surtout nombreux à Ploujean au début du XVIIe siècle bien que les jouvencelles de cette charmante commune n’aient jamais eu la réputation de facilité de leurs voisines du Ponthou, de Saint-Michel-en-Grève, de Poullaouen et autres cythères basses-bretonnes. Il semble qu’on y soit venu d’ailleurs faire ses frasques. En 1598 et en 1600, Constance Michel met au monde deux enfants illégitimes des œuvres de René de Coatanscour, seigneur de Kervény, en Plougasnou. D’autres nobles de Plougasnou, de Taulé, de Morlaix, sont attribués pour pères aux rejetons d’Anne Rolland, de Marie Mével, d’Annette Guichart (1604) et de Jeannette Poucher (1612).

Un seigneur de la paroisse, Guillaume de la Forest de Guicaznou, qui habitait Trofeunteniou, le futur domaine du maréchal Foch, rend mère, en 1605, Catherine Pen, quoique déjà marié lui-même depuis dix ans, à Catherine de Gouzillon, qui l’année suivante lui donnera un fils légitime, Pierre de la Forest. Ce jeune gaillard suivit les traces paternelles. Il avait à peine 20 ans qu’on baptisait en 1626, un fils né de son commerce avec Claudine Morvan. En 1631, une seconde maîtresse, Marguerite Louczé, le gratifiait d’une fille. Il épousa peu après Gillette-Renée de Kerouzéré, et le mariage paraît l’avoir assagi, car on ne trouve pas qu’il ait semé d’autres « canards sauvages » de par le monde.

Un exemple de ces mœurs relâchées nous est fourni par Pierre de Boiséon, très puissant gentilhomme qu’Henri IV avait récompensé de sa fidélité méritoire en le comblant de faveurs et de dignités, et en le nommant gouverneur de Morlaix. Resté veuf de sa femme Jeanne de Rieux, il ne se remaria point, mais il donna à cette illustre dame, issue du sang royal de Saint-Louis et des ducs de Bretagne, une remplaçante un peu inattendue en la personne d’une belle et rustique paysanne de Lanmeur, Catherine Parfait. Cette compagne « main gauchère » augmenta sa progéniture, de 1604 à 1613, de sept rejetons nouveaux.

La chose semble n’avoir scandalisé personne. Bien que déclarés illégitimes dans leurs actes de naissance, tous ces enfants, nés au château de Boiséon, sont baptisés pompeusement à Lanmeur, avec étalage des titres et qualités de leur père, et parrains et marraines choisis parmi la bonne gentry de l’endroit, sous le nom seigneurial de Keranmoroc’h, terre noble des environs de Guingamp qui faisait partie de l’apanage des Boiséon.

Le vieux comte mourut en 1627, après avoir marié deux de ses bâtardes, Constance et Fianette de Keranmoroc’h, à de petits gentilshommes, Perceval Cazin de Kerriou et Richard de Ladouceur (sic). Un fils survivait aussi, François de Keranmoroc’h, qui fut seigneur de l’humble manoir de Rosgustou, en Garlan, et y mourut célibataire, en 1665.

À Plougasnou et Plouézoc’h, de 1557 à 1611, quelques naissances entachées de bâtardise sont attribuées aux œuvres de François Cazin de Kerriou, de Pierre et François Le Ségalen de la Villeneuve, d’Olivier du Parc de Trégoadalem. En 1622, Marguerite de Brézal, demoiselle issue de noble race, mais bien déchue, est mère, à Plougasnou, du fait de Pierre Pastour du Pouldu. En 1642, une autre demoiselle noble, de petite vertu, Marie de Kerbouric, maî-