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Page:Anatole France - Balthasar.djvu/169

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l’herbe. Je vais, pour les rafraîchir, envelopper tes pieds dans des feuilles ; puis j’irai te chercher à souper. J’ai vu là-haut, proche de la route, des ronces toutes noires de mûres. Je t’apporterai dans mon chapeau les plus belles et les plus sucrées. Donne-moi ton mouchoir ; j’y mettrai des fraises, car il y a des fraisiers ici près, au bord du sentier, à l’ombre des arbres. Et je remplirai mes poches de noisettes.

Il arrangea au bord du lac, sous un saule, un lit de mousse pour Abeille, et il partit.

Abeille, étendue, les mains jointes, sur son lit de mousse, vit des étoiles s’allumer en tremblant dans le ciel pâle ; puis ses yeux se fermèrent à demi ; pourtant il lui sembla voir en l’air un petit Nain monté sur un corbeau. Ce n’était point une illusion. Ayant tiré les rênes que mordait l’oiseau noir, le Nain s’arrêta au-dessus de la jeune fille et fixa sur elle ses yeux ronds, puis il piqua des deux et partit au grand vol. Abeille vit confusément ces choses et s’endormit.

Elle dormait quand Georges revint avec sa cueillette, qu’il déposa près d’elle. Il descendit au bord du lac en attendant qu’elle se réveillât. Le lac dormait sous sa délicate couronne de