Page:Anatole France - Balthasar.djvu/207

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leur capuchon orné d’une cocarde de feuillage, et rien n’était plaisant à voir comme les jeux de ces petits hommes à barbes d’ermite. Le vertueux Tad, le sensible Dig, qui l’aimaient depuis le jour où ils l’avaient vue endormie au bord du lac, et Pic, le vieux poète, la prenaient doucement par le bras et la suppliaient de leur confier le secret de son chagrin. Pau, dont l’esprit était simple, mais juste, lui présentait des raisins dans une corbeille ; et tous, la tirant par le bord de sa jupe, répétaient avec le roi Loc :

— Abeille, princesse des Nains, pourquoi pleurez-vous ?

Abeille répondit :

— Petit roi Loc et vous tous, petits hommes, mon chagrin augmente votre amitié, parce que vous êtes bons ; vous pleurez quand je pleure. Sachez que je pleure en songeant à Georges de Blanchelande, qui doit être aujourd’hui un brave chevalier et que je ne reverrai pas. Je l’aime et je voudrais être sa femme.

Le roi Loc retira sa main de la main qu’il pressait et dit :

— Abeille, pourquoi m’avez-vous trompé en me disant, à la table du festin, que vous n’aviez d’amour pour personne ?