Page:Anatole France - Balthasar.djvu/212

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sa science, il partageait l’innocence et la candeur de sa race.

— Nur, lui dit le roi en l’embrassant, je viens te consulter parce que tu sais beaucoup de choses.

— Roi Loc, répondit Nur, je pourrais savoir beaucoup de choses et n’être qu’un imbécile. Mais je connais le moyen d’apprendre quelques-unes des innombrables choses que j’ignore, et c’est pourquoi je suis justement renommé comme un savant.

— Eh bien, reprit le roi Loc, sais-tu où est présentement un jeune garçon nommé Georges de Blanchelande ?

— Je ne le sais point et n’eus jamais la curiosité de l’apprendre, répondit Nur. Sachant combien les hommes sont ignorants, sots et méchants, je me soucie peu de ce qu’ils pensent et de ce qu’ils font. À cela près que, pour donner du prix à la vie de cette race orgueilleuse et misérable, les hommes ont le courage, les femmes la beauté et les petits enfants l’innocence, ô roi Loc, l’humanité tout entière est déplorable ou ridicule. Soumis comme les Nains, à la nécessité de travailler pour vivre, les hommes se sont révoltés contre cette loi